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chronologie 1946 |
BULLETIN
INTÉRIEUR DU 25 FÉVRIER 1946 – N° 9
Nos deux tracts largement diffusés ont reçu un bon
accueil. Il
règne dans les usines un profond mécontentement contre
les staliniens et la
politique gouvernementale. Le mot d'ordre produire est accueilli comme
une
plaisanterie et le stalinisme est fort à l'heure actuelle
surtout par sa
position étatique. Le mécontentement des ouvriers
vis-à-vis d'eux augmente
notre influence et l'accroissement du nombre des nos liaisons est une
nouvelle
preuve de l'importance du travail dirigé sur les usines. Dans
deux usines,
liaisons de la cellule Citroën,ce sont même des staliniens
qui ont fait
circuler nos tracts. C'est avant
tout la situation économique
qui est à la base des réactions ouvrières. Ainsi,
à l'usine Gnôme [et Rhône],
devant l'impuissance de la CGT, des ouvriers ont proposé de
passer par
l'intermédiaire de la CFTC pour leurs revendications, car ce qui
les
intéressait avant tout, c'est de trouver un moyen, une
organisation pour aboutir. La cellule
Citroën signale qu'à Clichy
des ouvriers parlent de la nécessité d'un pouvoir fort
sans pour cela lui
donner un contenu prolétarien. "Le mécontentement des
travailleurs laisse
pénétrer un courant fasciste introduit par les chefs de
l'entreprise au service
de la direction. Il a été décidé de sortir
un tract à ce sujet qui fera appel
aux staliniens pour lutter contre ce courant par une action
basée sur la lutte
de classe." Le tract "QUI
L'EMPORTERA"[1]
n'a pas été d'abord très bien compris par nos
camarades. Une question a
particulièrement été soulevée: "Comment
peut-on forcer les social-traîtres
à agir dans ce sens?" Le danger
fasciste dont il est question
dans ce tract est aujourd'hui une réalité. Mais d'un
côté, "l'unanimité
nationale", d'un autre côté, le comportement des
social-patriotes font que
là-dessus, les ouvriers sont encore en pleine illusion. Les
social-patriotes
ont présenté le départ de De Gaulle comme leur
victoire et leur langage nouveau
sur un nouveau six février n'est pas compris par les ouvriers.
C'est cela qui
est à la base de l'incompréhension de nos camarades. En
1934, le danger
fasciste apparaissait clairement parce que le fascisme était
descendu dans la
rue. L'activité des fascistes avait dressé les ouvriers
avant que les chefs en
donnent le mot d'ordre et l'activité des ouvriers a
poussé les chefs et créé le
front unique du 12. L'unité de combat est issue du danger
fasciste actif.
Aujourd'hui, un danger immédiat aurait fait comprendre notre
tract car les
ouvriers, devant le nouveau danger, auraient acculé les chefs
à agir. Ceux-ci
parlent du danger fasciste mais n'agissent pas. La contradiction
« POUSSEZ
LES CHEFS EN AVANT » - « ROMPEZ AVEC
EUX » n'est qu'apparente.
Il s'agit en réalité de deux aspects d'une même
attitude. Il ne sert à rien de
faire une propagande dans le sens de « DÉTOURNEZ-VOUS
DES SOCIAL-TRAÎTRES »
si en même temps on ne tient pas compte que la classe
ouvrière a ses
organisations historiquement constituées avec lesquelles elle
entre forcément
dans la lutte et qu'elle doit dépasser dans l'action. C'est
cela, le véritable
aspect du front unique (voir « ET MAINTENANT »,
« ENTRETIEN AVEC
UN OUVRIER SOCIAL-DÉMOCRATE » etc., de Léon
Trotsky)[2]. À la
suite de la saisie de LA VÉRITÉ, nous avons
adressé au PCI la
lettre suivante: "Ayant eu connaissance des circonstances de la bagarre
de
la rue Mouffetard, nous vous faisons part de notre expérience
dans ce domaine.
La première chose qui nous frappe, c'est que les camarades qui
font les ventes
ayant été avertis de ce qui les attendait n'aient pas
soigneusement préparé le
terrain par la diffusion de tracts dénonçant les menaces
des staliniens et
demandant à la population de s'opposer à de tels
procédés. En effet, ce qui estessentiel pour créer
un rapport de forces en notre faveur
c'est de
s'assurer préalablement de la sympathie des ouvriers pour nous
ou tout au moins
de leur opposition à de semblables méthodes de la part
des staliniens. C'est pourquoi,
c'est surtout devant les
usines et non pas dans les quartiers que l'on peut mener à bien
ce travail.
L'expérience nous a montré que devant les usines
où nous avons entrepris de
vendre sans un travail préalable à l'intérieur de
l'usine (par exemple à la
Précision mécanique) nous avons subi un échec,
bien que nous ayons réussi à
diffuser un certain nombre de tracts. Il faut en
outre, peser rigoureusement les
circonstances exactes dans lesquelles s'effectue notre vente et
élaborer un
plan précis contenant même des ruses de guerre. Si on
laisse les camarades
chargés de la vente dans des conditions
d'infériorité telles qu'elles
permettent aux staliniens de les écraser, c'est une façon
de contribuer à
l'échec de l'effort révolutionnaire tendant à
contraindre les staliniens, par
la pression ouvrière, à renoncer à leurs
méthodes de gangsters." Extrait du
MILITANT[3]:
..."· Chicago des staliniens attaquent des diffuseurs du
'Militant". Chicago, le 13
Janvier. Des diffuseurs du « Militant »
ont été attaqués aujourd'hui par des staliniens
devant le Cotisée de Chicago,
où le PC local tenait un meeting à la mémoire de
Lénine. Comme 5
diffuseurs de « Militant »
s'approchaient de l'entrée, des membres du PC essayèrent
d'arracher un paquet
des mains d'une femme. Serrant les journaux, elle les repoussait et les
mordait
tandis qu'ils voulaient la faire tomber. Une mêlée
s'ensuivit, avec coups de
poing, cris et des « Militants » lancés en
l'air. Tandis que la
foule se répandait, les
diffuseurs se réorganisèrent en groupes
stratégiques. Plusieurs autres
tentatives violentes de les endommager furent faites, mais toutes
furent
repoussées grƒce à l'efficacité de la
défense organisée. Chaque diffuseur
féminin était constamment gardé par une escouade
de défenseurs. Dans un dernier
et faible effort, les
staliniens demandèrent à quelque diffuseurs de quitter,
les menaçant de mauvais
résultats en cas de refus. Ne recevant pas de réponse,
ils furent obligés de
rester de côté, rouspétant ou déchirant
vainement les « Militants »
tombés qu'ils pouvaient ramasser. « Nous
avons organisé ce meeting »,
gémissaient-ils. « De quel droit nous
dérangent-ils? » Les
gens offraient de nous payer les
journaux, qui étaient diffusés gratuitement. Des ouvriers
présents, qui
n'avaient jamais encore vu les staliniens dans un tel état
dégradant, étaient
troublés par leurs méthodes. En prouvant
leur capacité de mettre en
déroute les staliniens vindicatifs physiquement -devant leur
attaque - et
politiquement, les membres du Socialist Workers Party (Parti ouvrier
socialiste) ont réussi la diffusion de 1000 journaux, ne
quittant pas le terrain
avant qu'il ne soit vidé. (Extrait de
notre journal américain « The Militant »
du
19/l/1946.) Nous avons
remarqué une similitude de méthodes d'action avec nos
camarades américains, également en ce qui concerne les
campagnes intensives de
visites à domicile. C'est certainement la composition sociale de
l'organisation
qui dirige l'action dans ce même sens. INFORMATIONS VERBALES RECUEILLIES PAR
LIAISON PCI
« Il y a actuellement 38 sections de la IVe Internationale
dans le monde. Le SI va publier une brochure retraçant
l'activité des
différents sections, pendant la guerre.
La plus forte section se trouve aux USA. Il y a deux tendances au
sein du SWP: celle de la majorité (Cannon) et la tendance Morrow
qui serait sur
les positions de l'ancienne tendance Shachtman. Il serait question
d'une
scission entre ces deux tendances. « The
Militant » tire à 50.000
exemplaires, il a 35.000 abonnés. En Hollande
l'organe de la IVe Internationale tire à 20.000. En Belgique la
« Lutte Ouvrière »
tire à 20.000 exemplaires mais couvre ses frais par la vente. En Italie Il y
a un groupe dans le nord et
un autre dans le sud desquels nous n'avons que dès informations
vagues. En
Grèce, il y a 3 groupes en voie
d'unification, qui d'après le PCI sont sectaires. En Indochine,
il y a différents groupes
mais nous avons très peu d'informations. Aux Indes. il y
a deux groupes, un au nord
et l'autre au sud qui ont peu de contacts entre eux du fait des
distances. En Egypte. il y
a deux groupes qui
viennent de subir une forte répression. Il y a un
groupe espagnol en France et un
autre au Mexique. Le groupe du Chili est relativement à la
population le plus
important. Il paraître que c'est lui qui contrôle le
mouvement ouvrier au
Chili. Au Canada, il y
a un groupe important qui
milite en fraction au sein de la SFIO. Il est illégal mais il y
a un député
trotskyste élu sur les bases social-démocrates qui est
connu comme trotskyste. Le groupe
australien est important mais
refuse le contrôle du SI. En Allemagne
quelques émigrés ont des
positions révisionnistes (voir revue)[4].
Une conférence internationale est envisagée pour
préparer un Congrès
international. » [1]
Sur
le tract Qui l'emportera? Nouveau langage - Ancien régime,
daté du 11
février 1946 et signé "La Lutte de Classes [2]
Les
deux textes de Trotsky mentionné ici sont la brochure Et
maintenant?
Janvier 1932) et l'article "Entretien avec un ouvrier
social-démocrate
(À propos du front unique de défense)" (23
février 1933), publiés dans
L.Trotsky, [3] The Militant était depuis novembre 1928 le journal des trotskystes aux États-Unis. · l'époque où ce document fut rédigé. il était l'organe du Socialist Workers Party, section américaine de la Quatrième Internationale [4] il s'agit du document -La question nationale. Trois thèses", élaboré par les Internationales Kommunisten Deutschlands (IKD) et daté du 19 octobre 1941, qui avait été publié dans la revue du Comité Exécutif Européen trotskyste Quatrième Internationale, N° 25-26 (Nouvelle série), décembre 1945-janvier 1946 |