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chronologie 1947 |
N° 1 |
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13 février 1947
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LA
VOIX DES TRAVAILLEURS DE CHEZ RENAULT
POURQUOI
CE
BULLETIN La semaine
dernière, des ouvriers du secteur Collas ont
lancé une liste de pétition pour protester contre la
mauvaise répartition de la
prime de production, dont la conclusion était : qu'ils
mandataient
les délégués ouvriers pour intervenir
auprès du comité d'entreprise. Dès le
second jour, dans le secteur Collas seul , cette liste recueillait 850
signatures.
D'autres listes sont encore en circulation, ce qui signifie que cette
protestation recueillait l'approbation de la majorité des
ouvriers. En effet
qui n'a pas été indigné de ce que ce soient les
IMPRODUCTIFS qui reçoivent la
plus grosse part de la prime de PRODUCTION. Néanmoins,
un fait aussi minime que la protestation des
ouvriers contre une décision de leurs responsables, prise sans
les consulter, a
donné lieu à des incidents et à des conflits
à première vue surprenants. C'est
ainsi que des responsables syndicaux ont tenté de faire
disparaître des listes
et ont menacé de représailles des camarades qui les
faisaient circuler. Le
motif invoqué en général fut qu'en se montrant
hostiles aux décisions des
dirigeants, on semait la division. A-t-on oui ou non le droit d'avoir
une
opinion et de l'exprimer ? Nous, en tant
qu'ouvriers, nous avons décidé de discuter,
au moyen de ce bulletin, quelle est l'attitude qu'on doit avoir ; nous
voulons
opposer la conception de la majorité des ouvriers prise sur le
vif, à ceux qui
prétendent avoir le secret du " bon point de vue " , et qui
n'hésitent pas, pour faire triompher ce point de vue, même
QUAND IL EST EN
CONTRADICTION AVEC L'OPINION DE LA MAJORITE DES OUVRIERS, à
employer des
procédés répugnants. Un groupe
d'Ouvriers de la RNUR AU SECTEUR
COLLAS La circulation
des listes de pétition provoque la
réaction d'un " responsable " qui veut en faire
disparaître deux. Mais
un ouvrier l'oblige à les rendre. Les listes sont transmises aux
délégués. En
Commission Exécutive, Plaisance, secrétaire de la section
syndicale, laisse
entendre que cette liste est lancée par les OS et les P1 et que
ce qui compte,
c'est le les professionnels et la maîtrise soient satisfaits.
Devant une telle
attitude, des responsables démissionnent et les collecteurs
décident de ne plus
collecter le timbre si aucune suite n'est donnée à la
pétition. Déjà nombre
d'entre eux ont refusé de vendre la V.O. en signe de
protestation. DANS LE
DEPARTEMENT 18 Un
délégué s'oppose également à la
circulation des
listes. Mais là aussi, il doit reculer devant l'indignation des
ouvriers. DANS LE
SECTEUR
EMILE ZOLA Un responsable
" confisque " la liste à la 5ème
signature ; le camarade qui la faisait circuler reçoit une
délégation qui
essaie de le convaincre de l'effet néfaste de la
pétition. Ils prétendent que
la majorité des ouvriers approuvent la prime. - " Comment
peut-on savoir si la majorité est
d'accord, répond l'ouvrier, si on ne nous a pas
consultés. Le meilleur moyen de
le voir, c'est de laisser circuler la liste. Puisqu'il n'y a jamais de
réunions, nous sommes bien obligés de protester comme on
peut. " - " Il y en a
qui ont beau jeu de semer la division
en ce moment " répond le délégué. - " C'est la
prime qui sème la division. " Les
délégués s'en vont ent en colère et les
ouvriers sont
très indignés de ce qu'on les accuse de " semer la
division " parce
qu'il réclament l'égalité de la prime. Dans un autre
coin du secteur Emile Zola, le
mécontentement était dû au fait que la prime
n'avait pas été payée dans cette
quinzaine. Néanmoins, les camarades se solidarisent
entièrement avec la
pétition. Vendredi,
à 12 heures, l'ouvrier qui faisait circuler la
liste reçoit la visite de deux responsables qui le somment de
les suivre. Comme
il refusait, ils reprennent : - " Tu as tort,
ça peut s'arranger entre nous, à
l'amiable. " - " Mais, qui
êtes-vous ? " - " Veux-tu
venir, oui ou non. Sinon, nous
t'enverrons chercher entre deux gardiens. Nous t'emmènerons chez
Dutenne.
" Les ouvriers
s'indignent. Les délégués s'en vont et
reviennent dix minutes plus tard demander au chef d'équipe le
nom et le numéro
de pointage du camarade, qui proteste : - " C'est du
travail de flic, de mouchard. " Devant la
colère et les protestations des ouvriers, ils
repartent. Puis vient le délégué du secteur qui
déclare désapprouver ces
méthodes et une discussion s'engage dont la conclusion est : "
De deux
choses l'une : ou le syndicat est une organisation démocratique,
et tout le
monde a le droit de s'exprimer, ou on a juste le droit de payer le
timbre. " CAMARADE . FAIS
CIRCULER CE BULLETIN AUTOUR DE TOI ET
CONTRIBUE A NOTRE TRAVAIL ! Un groupe
d'ouvriers de la RNUR PAYE Dans chaque
secteur, il ne se passe pas de quinzaine sans
qu'il y ait au moins trois ou quatre erreurs, toujours à
l'avantage de la
direction. Si
l'ouvrier ne s'en aperçoit pas, c'est toujours autant de pris.
Et tandis qu'on
s'occupe de faire régulariser sa paye, on n'a pas le temps de
s'occuper de
revendications générales. A
BAS LE TRAVAIL AU BONI. COURANT On
nous fait faire dix heures par jour parce que, soi-disant nous manquons
de
courant. Néanmoins, le vendredi où nous devrions nous
reposer, et même le
samedi, on fait venir des gars pour travailler. Le résultat
c'est que, bien
souvent, un gros moteur tourne pour une ou deux machines. Il en est de
même le
soir, de 6h à 11h. Le manque de courant a été un
PRETEXTE pour nous habituer à
faire dix heures par jour. MANIFESTATION Notre
section syndicale nous a appelés à assister à la
manifestation du 9 février. Depuis
deux ans, les manifestations de parade ne nous ont rien apporté.
C'est à
l'usine et pendant le travail que les ouvriers veulent mener l'action. Parce
que il n'y a que comme ça qu'on pourrait faire entendre raison
aux patrons. PALMARES
OUVRIER |