LA
VOIX DES TRAVAILLEURS DE CHEZ RENAULT
CHRONOMETRAGES
Les
temps d'avant guerre sont nettement insuffisants d'autant plus que les
machines
se sont usées, certaines ont été
détériorées par les bombardements. D'autre
part un ouvrier de 1947 ne peut soutenir la même cadence qu'un
ouvrier de 1938
car la nourriture d'aujourd'hui est loin d'être ce qu'elle
était avant-guerre.
Les privations de 5 années de guerre ont usé nombre
d'ouvriers dont beaucoup
furent déportés ou prisonniers. Enfin, on ne peut tenir
pendant 45, 54 et même
60 h. la même cadence que l'on tenait pendent 40 h.
Dans
de nombreux endroits en attendant les nouveaux chronométrages,
les
contremaîtres ont alloué des suppléments qui sont
payés par des bons chamois.
Depuis
que ce système existe il aurait été juste de
revendiquer l'homologation des
suppléments à l'exception de quelques cas particuliers.
La
C.G.T. qui a toujours capitulé sur les revendications de salaire
met en avant
la révision des chronométrages. Or nous savons que
lorsque les chronos
descendent c'est pour saboter les temps et non pour les augmenter.
Effectivement les temps officiels d'avant-guerre sont augmenté
mais les temps
réels sont diminués. Ainsi un temps qui était de
4' et qui bénéficiait d'un
supplément de 4' ce qui le portait à 8' est
chronométré à 6' soit une perte de
2'.
Comment
se défend la direction ? Elle dit : " Actuellement vous marchez
à 75 et
80' dans l'heure, c'est anormal. Nous allons diminuer les temps pour
les
ramener à 60'. Mais nous augmenterons le taux minute. Or
les temps
actuels ont été établis sur la base de 60' et non
de 80'. Si nous faisons 80'
et plus dans l'heure (130 et 135%) c'est que nous avons poussé
notre cadence au
maximum.
Baisser
les temps est un vol manifeste qui consiste à nous imposer la
cadence maximum
comme temps normal.
Le
temps maximum il y a un an (70' dans l'heure) deviendra un temps
coulé alors
que le temps maximum d'aujourd'hui deviendra un temps minimum.
La
direction a d'ailleurs d'autres moyens de diminuer les temps. Ainsi
dans
certains travaux, on établissait des bons toutes les 100
pièces. Chaque
opération bénéficiait donc d'un montage toutes les
100 pièces. Maintenant on
établit des bons pour 500 et même 1000 pièces avec
un seul montage.
De
cette façon on arrive à voler une heure et plus à
chaque ouvrier sur une
journée de 8 heures. Si la révision des
chronométrages n'a amené aucune
amélioration pour l'ensemble des ouvriers, par contre dans
beaucoup d'endroits
elle a entraîné une diminution de salaire ou, pour un
salaire équivalent, une
augmentation de la cadence.
A
l'artillerie à la suite d'une descente des chronos les salaires
qui étaient de
62 a 68 frs sont descendus à 54 frs ce qui a provoqué le
débrayage.
Ainsi
la révision des chronométrages, revendiquée par la
C.G.T., se retourne contre
nous.
Le
travail au rendement sous toutes ses formes est une vaste duperie.
Quand nous
revendiquons un meilleur salaire, une journée de travail plus
courte, le
patronat se défend. Mais dès que nous cessons la lutte,
non seulement la
bourgeoisie ne nous augmente pas mais encore elle nous attaque sans
cesse. Elle
cherche à nous embrouiller dans un tas de combines qui n'ont
qu'un but :
augmenter notre travail et diminuer notre salaire.
Aux
combines patronales du travail aux pièces et au boni, la C.G.T.
oppose les
combines du salaire progressif et des primes à la production.
Nous les
ouvriers, nous rejetons toutes les combines et revendiquons un salaire
minimum
vital indépendamment de la cadence réalisée.
A
BAS LE
SALAIRE AU RENDEMENT
Pétition
au secteur Collas La liste de pétition réclamant une
augmentation de 10 frs. de
l'h. a circulé dans la moitié du département 6
(secteur Collas) et a recueilli
307 signatures. Partout où les listes ont été
présentées elles ont recueilli la
grosse majorité des signatures. Dans certains ateliers nous
n'avons pas pu
faire circuler les listes, dans d'autres n'ayant pas été
surveillées, elles ont
été subtilisées. Néanmoins la revendication
étant appuyée par une majorité
d'ouvriers, des camarades l'ont portée au
délégué Facompré qui a pris
l'engagement de poser la revendication à la direction
accompagné par des
signataires de la pétition.
Si
la premiére pétition au sujet de la prime a pu être
étouffée, les délégués ont
été obligés de tenir compte de la seconde car ils
ne peuvent à l'infini passer
outre la volonté de la majorité. Néanmoins nous ne
devons pas nous faire
d'illusion sur l'appui des délégués. En effet,
Facompré ne déclarait-il pas le
jour du débrayage ? : "10 frs. vous ne les aurez pas". Nous
posons
alors la question : "Lorsque la CGT a mis en avant le minimum vital (10
frs. de l'heure sur le taux de base) était-ce de la
démagogie, puisque vous les
délégués, vous n'y croyez pas ?".
Nous
savons que la direction ne nous donnera pas les 10 frs.
C'est
par notre combattivité et notre action organisée que nous
ferons plier la
direction. Nous n'attendons pas qu'on nous donne les 10 frs. Nous
entendons les
imposer par notre lutte.
Où
sont
les diviseurs ?
Dans
tous les secteurs de l'usine où il y a eu des débrayages,
la direction s'est
employée à les briser et à les étouffer.
Lorsque mardi dernier les "
responsables" syndicaux ont annoncé que l'on quitterait à
5 h. de nombreux
ouvriers ont réagi en disant : " vous avez saboté notre
mouvement nous n'iront
pas à votre manifestation". Certains allèrent à la
manifestation, la plus
grande partie quitta à 5 h. mais rentra directement à la
maison. D'autres
arrêtèrent à 5 h. pour ne pas agir en jaunes mais
restèrent a leur machine pour
marquer leur désapprobation vis à vis de manifestations
de parade. D'autres
enfin, moins conscients, continuèrent à travailler. C'est
ainsi en lançant des
mots d'ordre anti-ouvriers tels que les primes a la production et en
brisant
les mouvements revendicatifs, les"dirigeants" syndicaux brisent
l'unité ouvrière.
Aux
essieux.
Les
ouvriers désertent de plus en plus la CGT et chaque mois les
collecteurs
enregistrent de nouveau refus de payer le timbre. Aussi, les
délégués
soumettent-ils les réfractaires à un interrogatoire en
règle sur les raisons de
leur démission. La semaine dernière pour se venger de
certains, ils ont
chronométré le temps qu'ils passalent au WC la
journée durant afin de pouvoir
les faire mettre à la porte. Et ceci ouvertement.
Est-ce
ainsi que nos délégués espèrent faire
rentrer les timbres ?
A
bas les 48
heures !
Il
est question de nous faire travailler 48 heures par semaine. Nul doute
qu'au
nom du mot d'ordre "produire" la section syndicale laisse passer la
chose.
Il
ne faut pas que nous nous laissions faire. Voici les chaleurs, le
travail sera
plus pénible.
Les
salaires sont bas ? Mais ce n'est pas 3 heures de travail
supplémentaire qui
nous ferons boucler notre budget. Il nous en manque plus que cela. Mais
ce sera
3 h. de plus à passer dans le bagne Renault, et un peu moins de
repos et de
liberté.
A
bas les heures supplémentaires ! Un salaire suffisant pour un
travail décent !
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