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chronologie 1948 |
N° 29 |
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7 JANVIER 1948
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Adresser toute correspondance, abonnements et mandats par poste à JEAN BOIS, 65, rue Carnot, Suresnes (Seine) |
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Rendez-vous de 18h à 20h :
café-tabac «Le
Terminus» angle r. Collas av. Edouard Vaillant. M° Pont-de Sèvres |
Dans son bulletin
n°
4, le Syndicat Démocratique Renault prend position contre
l'adhésion
à la nouvelle C.G.T.-Force Ouvrière. Rappelant la
complicité
qu'il y a eu pendant des années entre les tendances frachoniste
et jouhaussiste contre les ouvriers, le bulletin conclut : "Ce n'est
pas
vers des bureaucrates, mais vers les ouvriers les plus conscients, les
plus dévoués et les plus combatifs de l'usine qu'il faut
regarder."
Mais alors sur quoi vous appuierez-vous, nous a-t-on demandé ? Les prétendus militants, capables de poser une telle question, montrent qu'en dépit de leur "communisme", "socialisme", etc., ils n'ont aucune confiance dans l'action révolutionnaire des masses : ces gens ne conçoivent pas qu'on puisse exister en dehors de grands appareils officiels, soutenus soit par la bourgeoisie française, comme c'est le cas de Jouhaux et Cie, que la scission n'inquiétait autrement que par la crainte de se voir privé de l'appareil syndical (le gouvernement les a déjà rassurés à ce sujet), soit, comme les frachonistes, par l'appareil de l'ancienne C.G.T. et de la bureaucratie moscovite. C'est ainsi que des minorités syndicales, qui se prétendaient à l'origine indépendantes, comme la Fédération postale, celle du Métro, ou les Comités d'action syndicaliste, les premiers en se disputant les postes, les derniers tout en regrettant de marcher avec Jouhaux, ont donné leur adhésion à la confédération jouhaussiste. Avec ou sans regrets, ils en arrivent aux mêmes résultats : l'inféodation du mouvement ouvrier, par la bureaucratie syndicale de Jouhaux, au camp américain ; par la bureaucratie de Frachon, au camp russe. Quant à nous, messieurs, nous nous appuierons sur une force autrement grande que vos lourds et mesquins appareils bureaucratiques, pépinières de parvenus. Nous nous appuierons sur la classe ouvrière, sur l'action des travailleurs de base. Sur qui donc nous sommes-nous appuyés au mois de mai ? Nous étions bien moins nombreux alors qu'aujourd'hui, et cependant, contre le gouvernement, contre la bureaucratie frachoniste et jouhaussiste faisant front commun, nous avons été soutenus par la volonté de lutte des 30.000 ouvriers de chez Renault, derrière lesquels la classe ouvrière entière se tenait prête à combattre. Bien sûr, cette volonté de lutte ne se manifeste pas tous les jours. Nous avons dû attendre pendant longtemps, de 1944 à 1947, que la classe ouvrière rompe la collaboration de classes et reprenne ses traditions de lutte gréviste contre la bourgeoisie. Si les efforts réunis des bureaucrates, ont réussi, encore une fois, à détourner de ses buts naturels la lutte ouvrière à peine commencée, cela ne veut pas dire qu'ils ont gagné. Cela signifie seulement que de même qu'il a fallu trois ans de collaboration de classes pour convaincre la classe ouvrière que seule l'action directe était la voie du salut, de même il faudra encore du temps et des expériences pour que la lutte ouvrière aboutisse à l'élimination définitive des bureaucrates. Il n'y a pas d'autre route, pour que la classe ouvrière arrive à s'émanciper, que sa propre expérience, qui est rude, parce que ses ennemis sont nombreux et ses défenseurs encore rares. Il est plus difficile aujourd'hui de s'appuyer sur les travailleurs que sur des appareils bureaucratiques et des postes assurés. Mais c'est le seul moyen de s'assurer de la victoire finale. Car celle-ci appartiendra seulement à ceux qui sauront rester fidèles en toute circonstance à la classe ouvrière. LA
VOIX DES TRAVAILLEURS.
Dès la fin du mouvement gréviste, M. Schuman déclarait en substance : "En mettant fin à son mouvement, la classe ouvrière s'est montrée raisonnable et soucieuse des intérêts généraux ; c'est maintenant au gouvernement de montrer qu'il peut nourrir le pays et assurer son redressement." Et qu'a fait ce gouvernement ? Aux travailleurs "raisonnables" il a accordé une augmentation fictive des salaires : il leur a retiré d'une poche plus qu'il ne leur avait mis dans l'autre. Il a réalisé "l'alignement des prix industriels" par une nouvelle hausse. Il a "équilibré" - pour la nième fois - le budget, en instituant un nouvel impôt qui, devant lui rapporter 150 milliards environ, couvrira à peu près la moitié des dépenses militaires de l'année. Il a "assaini" la monnaie, en chargeant paysans, commerçants, petits industriels et toutes les catégories moyennes de nouveaux prélèvements, taxes, contributions, etc... et, pour finir, en mettant à l'ordre du jour une nouvelle dévaluation du franc. En somme, il n'a rien fait que n'aient déjà fait ses prédécesseurs ; le plan Mayer : augmentation des impôts et hausse des prix, fait suite au plan Moch : hausse des prix et augmentation des impôts ; ces plans ayant eux-mêmes fait suite à d'autres innombrables plans Schuman, Philip, Blum, etc... qui ont systématiquement appauvri le pays. Mais de cette façon, à la longue, il ne s'agit plus d'une simple répétition mais d'une aggravation intolérable. Ce qui distingue le gouvernement Schuman, c'est que, rien ne restant plus à extorquer aux ouvriers, il se tourne plus spécialement contre les classes moyennes. Mais ceux dont le tour ne vient jamais, ce sont les riches. C'est bien pour cela que le seul bilan positif dont Schuman ne manque pas de se vanter, c'est d'avoir permis à la bourgeoisie de sortir indemne de la dernière vague gréviste, sans qu'elle ait eu à lâcher quoi que ce soit de ses privilèges. Cependant, un bilan non moins positif dont le gouvernement n'ose pas se vanter, c'est d'avoir englobé dans une même haine contre lui tous les travailleurs, tous les gagne-petit, toutes les catégories moyennes, toute la nation, à part la minorité de gros exploiteurs qu'il sert. C'est pour tirer profit de ce mécontentement qu'une opposition contre le gouvernement s'est manifestée à la Chambre, à droite et à gauche. Mais ce n'est pas de cette opposition que viendra la solution. Tous ces messieurs n'ont-ils pas en leur temps fait la même politique au gouvernement ? L'opposition irréductible n'est pas entre le gouvernement et ces députés. L'opposition véritable, que ceux-ci s'efforcent, par un simulacre d'opposition, de canaliser, est entre la bourgeoisie et les classes pauvres, c'est-à-dire dans l'incompatibilité du régime capitaliste avec une existence digne pour les masses laborieuses. Un gouvernement des pauvres se dressant contre le gouvernement des riches pourra seul apporter une solution à la misère du pays, mettre fin à l'incompatibilité entre la domination des riches et la vie des masses. Cette incompatibilité, la classe ouvrière est aujourd'hui arrivée à la réaliser à travers l'expérience de ses luttes successives. C'est ce qui rend la bourgeoisie peu rassurée, malgré son bilan de "victoire" de décembre, et lui fait redouter un "raz de marée de printemps". "Il s'agit de produire avec ce dont nous disposons, beaucoup plus, beaucoup mieux, beaucoup plus vite que ce que nous produisons." Avis aux travailleurs. La parution de La Voix a été suspendue, pendant trois semaines, à l'occasion des fêtes, pour permettre de résorber notre déficit croissant. Le journal reprend sa parution hebdomadaire sans que nos difficultés en soient pour autant résolues. Comme nous l'avons déjà répété, ce journal ouvrier ne peut compter que sur l'appui matériel des ouvriers. Aussi est-ce à chaque camarade de faire un effort pour soutenir le journal, principalement en intensifiant sa vente. Beaucoup de camarades, notamment, font circuler leur propre journal. Pour faire connaître La Voix, c'est très bien. Mais, une fois les nouveaux lecteurs acquis, ils doivent en faire des acheteurs. Sinon ils tarissent la principale source de revenus. Vendez le journal autour de vous et envoyez-nous des informations pour faciliter la tâche de sa rédaction !
A la suite du
"recul
stratégique"
de la C.G.T. devant l'échec partiel de la grève
générale,
les grévistes et les militants de base, à la gare de
Lyon,
pensaient, avec juste raison, qu'il fallait refondre la direction et le
conseil de notre section syndicale, c'est-à-dire, avant tout,
écarter
les responsables qui avaient eu une attitude peu courageuse pendant le
dur combat que nous venons de mener.
Le bureau syndical et, avec lui, le conseil syndical, dans leur grosse majorité, semblaient être de cet avis. Des postes relativement importants ne pouvaient plus être occupés par des gens qui avaient "flanché". Il convenait de trouver, dans l'avant-garde combative, qui s'était signalée, pendant cette grève, à la gare de Lyon comme partout ailleurs, de nouveaux responsables capables d'assurer ces tâches au mieux des intérêts des travailleurs. Il avait même été question, pendant un moment, de dénoncer publiquement tel ou tel pour son action de "jaune" et son attitude pleutre. Mais voilà ! Il y eut un "hic". Et ce hic fut objecté par ces messieurs de "l'Union régionale" : appliquer une telle mesure, c'était éloigner de la direction des camarades, peu encourageants certes, mais dociles et bien "dans la ligne". C'était attaquer publiquement et ouvertement des camarades plus ou moins sympathisants au P.C.F., quand ils n'en étaient pas membres actifs. C'était discréditer aux yeux de la "masse" certains hommes en qui elle avait mis sa confiance. C'était enfin porter un coup rude aux hommes du "grand parti de France", en mettant en doute les capacités, le courage, la dignité et la clairvoyance dont ils se targuent. Mais c'était aussi abandonner les postes de commande de l'organisation syndicale à des gens dont on ne connaissait pas suffisamment la "maturité politique" (lisez "la soumission docile aux ordres venant d'en haut"). C'était glisser dans l'appareil syndical, peut-être des éléments qui risqueraient de contrecarrer les directives immuables des bureaucrates Frachon et autre Monmousseau, d'en appeler à l'Assemblée générale pour trancher les divergences. Que deviendraient, alors, la "démocratie" et la "discipline" syndicales à la mode bureaucratique ? Non ! non ! Il vaut mieux garder des camarades moins dévoués à la cause ouvrière, mais dociles, tâcher de trouver des excuses plausibles à leur attitude pendant la grève, plutôt que risquer perdre complètement la direction du mouvement ouvrier.
La dernière
grève
et ses conséquences, parfois désastreuses, la scission
récente
aggravant encore les scissions antérieures (C.N.T. et C.A.S.)
auraient
pu faire croire que nos dirigeants allaient comprendre le danger de
leurs
méthodes anti-démocratiques et antiouvrières, de
leurs
méthodes bureaucratiques. En vérité, ils l'ont
compris
depuis longtemps et ne sont pas plus étonnés que cela des
récents événements. Mais ils sont esclaves de
leurs
propres méthodes, au risque de perdre leurs privilèges de
direction, s'ils essayaient de les modifier. Ils se trouvent ainsi dans
la même situation que la bourgeoisie qu'ils prétendent
combattre
: la bourgeoisie, de la même façon, sait que le socialisme
est la seule issue au marasme dans lequel sombre actuellement notre
civilisation,
mais elle ne veut pas non plus l'admettre, par crainte de perdre ses
privilèges
de classe dominante. LOUIS.
Conformément
à
son nouveau "tournant démocratique", à la suite de
l'échec
de la grève de novembre, la C.G.T. propose, dans beaucoup
d'usines,
"qu'il soit procédé dans chaque atelier ou bureau,
à
l'élection à bulletin secret de la C.E. d'atelier ou de
bureau".
Mais comment se fait-il donc que ces "démocrates" du bureau confédéral, eux, soient inamovibles comme des papes ? Bien qu'après avoir étouffé la démocratie dans les rangs ouvriers à l'aide de leur appareil bureaucratique, ils n'aient vraisemblablement pas de concurrence à redouter, les pontifes confédéraux craignent de nouvelles élections générales dans la C.G.T.
En toute
démocratie,
ils proposent aux syndiqués de remplacer dans les C.E.
d'ateliers
de petits bureaucrates par d'autres petits bureaucrates...
Début
décembre,
une circulaire de la direction prévenait les ouvriers de chez
Renault
qu'ils devraient désormais se conformer au "règlement
d'usine",
règlement qui, sous prétexte de maintenir l'ordre et la
bonne
marche du travail, inflige, en réalité, aux ouvriers le
régime
de caserne.
Si la direction a dû rappeler ce règlement et donner des ordres à la maîtrise pour le faire appliquer, c'est qu'à la suite de la grève du mois de mai, les ouvriers étaient en partie arrivés à s'en émanciper. Une des dispositions essentielles de ce règlement, notamment l'interdiction de faire circuler la presse syndicale et ouvrière en usine, avait complètement cessé d'être respectée. On comprend qu'un des premiers soucis de la direction, après la grève de novembre, ait été d'en revenir au "règlement" et à ses brimades : interdiction de se laver les mains avant l'heure, de quitter la machine quelques minutes avant le coup de klaxon, de faire circuler journaux, tracts, etc. Le patronat compte transformer l'ouvrier en une simple machine à produire. Quand le patron cherche encore, par ailleurs, à imposer à l'ouvrier des journées de 10 heures de travail avec lesquelles il lui est extrêmement difficile de trouver encore la force de se réunir, de lire la presse, etc., le règlement patronal équivaut à la négation des droits ouvriers élémentaires.
C'est bien pour cela
que,
malgré le règlement, les ouvriers continuent et
continueront
à faire circuler, à lire et à discuter la presse
ouvrière
en usine. Et devant l'unanimité des ouvriers, la direction sera
obligée de revenir à la "tolérance", selon sa
propre
expression, à laquelle, devant cette même unanimité
ouvrière, elle avait dû consentir jusqu'au mois de
novembre.
Aux fonderies, un
délégué
cégétiste a dénoncé au chef d'atelier un
ouvrier
du S.D.R. qu'il accusait d'avoir diffusé un tract. Le
mouchardage
fait-il donc partie de la nouvelle orientation "démocratique" de
la C.G.T. ?
La Juvaquatre passe
de
178.000
(prix du Salon 1947) à 270.000 francs, soit une augmentation de
52%. La 4 CV passe de 172.000 au Salon 1947 à 260.500 fr., soit
une augmentation de 51%. Le salaire d'un O.S. taux de base, passe de 40
fr.30 à 48 fr.26, soit une augmentation de 20%.
Dans les autres usines les augmentations sont dans les mêmes proportions : Citroën 11 CV légère, augmentation 52% Citroën normale augmentation...... 53% Citroën 15 CV augmentation........ 53% Peugeot 2O2 augmentation ......... 49,9%. On comprend pourquoi M. Lefaucheux a refusé de recevoir le S.D.R. lorsque celui-ci proposait comme solution pour mettre fin à la course entre les salaires et les prix (toujours au profit du patronat) :
- Soit que le prix des voitures soit calculé en fonction du prix de revient de la main-d'oeuvre.
Depuis
l'échec de
la grève de novembre, la direction, chez Simca, profitant d'un
état
d'esprit hostile à la C.G.T. dans l'usine, mène une
guerre
ouverte et acharnée contre la section syndicale. D'un
côté,
elle procède à l'élimination directe des
éléments
cégétistes (le dixième
délégué
vient d'être licencié ces jours-ci) sous le premier
prétexte
venu : le lendemain de Noël, par exemple, cinq
délégués,
dont le secrétaire général de la section
syndicale,
ont été mis à la porte pour avoir utilisé,
sans autorisation, la salle de la cantine pour une assemblée.
D'un
autre côté, la direction s'efforce de creuser le
fossé
entre la C.G.T. et les ouvriers en se posant en véritable
défenseur
des intérêts ouvriers. Elle évince notamment la
C.G.T.
de la gestion des cantines et du service social, évictions
sanctionnées
par votes des ouvriers :
La direction ayant
invité
les ouvriers à voter, les résultats furent : Direction :
1.035 voix ; C.E. : 733 voix.
Pour prouver encore
mieux
l'incapacité du comité d'entreprise, à une affiche
de celui-ci annonçant un déficit de 750.000 francs, la
direction
répliqua par une seconde affiche annonçant 1 million
230.000
francs.
Enfin, pour
couronner la
série de succès qu'elle a déjà
remportés
sur la section syndicale, la direction vient de proposer un vote pour
la
réélection des délégués, le 10
janvier.
Mais, en réalité, la direction n'a l'air de défendre les ouvriers contre "l'emprise des politiciens du P.C.F. et de la C.G.T." que pour mieux les désorganiser et les réduire à sa merci. En effet, si les ouvriers paient 12 francs moins cher le repas, "grâce à la direction" (qui ne fait, en réalité, que payer ainsi une partie du salaire qu'elle leur doit), les brimades ne s'en multiplient pas moins de jour en jour dans l'usine : tout groupe pris en train de discuter pendant le travail est aussitôt vertement rappelé à l'ordre ; la diffusion et la vente de journaux et tracts ouvriers sont formellement interdits ; le bruit court qu'il sera bientôt interdit de fumer...
Les brimades contre la
C.G.T. font donc partie d'un plan d'attaque général de la
direction contre tous les ouvriers de l'usine, de même que la
répression
gouvernementale ne visant, soi-disant, que "les éléments
troubles et les politiciens fauteurs de grève" s'est
étendue,
en définitive, à tous les ouvriers combatifs de base.
Pourquoi cette mesure ? Tout simplement pour donner les coudées franches aux patrons. La loi donne la possibilité de se débarrasser d'un indésirable, encore faut-il invoquer un motif professionnel. Mais pour licencier collectivement un grand nombre d'ouvriers il faut pour le moins faire faillite ou fermer l'usine. Or c'est un fait qu'un peu partout les commandes diminuent, par conséquent les patrons n'ont plus un besoin pressant de main-d'oeuvre, d'où la possibilité pour les patrons de rétablir la concurrence entre ouvriers en faisant faire aux uns 60 heures et plus, tandis que les autres sont à la pêche. Dans le calcul des patrons, ceux qui travailleront craindront de remplacer ceux qui sont au chômage, ils seront plus souples et moins exigeants. C'est ce qu'"ils" appellent la liberté de licenciement. Bien sûr, cela ne se passera pas aussi simplement. On invoquera le manque de crédits, de matière première, la nécessité, quand le travail manque, de faire travailler les pères de famille de préférence aux célibataires, mais en fin de compte, c'est le régime d'avant 36 que l'on voudra rétablir. Pour faire échec à ces plans, il est indispensable que les travailleurs contrôlent le licenciement et l'embauche afin de prévenir l'arbitraire patronal. De même que nous devons opposer au projet patronal l'exigence de la répartition du travail existant entre tous les bras, avec le minimum vital assuré.
Voyons ce que cela
donne
pour un O.S. Etant au coefficient 127, il devrait donc toucher 38 x
127
----------- = 48,26_ 100 de l'heure, c'est-à-dire un chiffre inférieur au minimum garanti : 52,50. Puisque la loi prévoit qu'on ne saurait descendre en-dessous de ce chiffre, l'O.S., quand il réglera à 100, sera donc payé à ce taux, comme le manoeuvre.
Mais si la maison
Renault,
par exemple, pratique avec le nouveau taux comme avec l'ancien, elle
retiendra,
pour calculer le boni, le chiffre de 48,26. Car la loi, qui est plus
faite
pour les patrons que pour les ouvriers, ne précise rien à
ce sujet. Seulement, le salaire ouvrier ne changera pas jusqu'à
ce qu'il ait atteint 100 x
48,26
---------------- = 108,78 % 52,50 de coefficient de production, c'est-à-dire qu'il fera 8,78% de boni non payé. Alors que normalement, et c'est ainsi que nous devons interpréter la loi, le boni devrait être calculé sur la base de 52,50. Avec un coefficient de production de 130, par exemple (le plus courant), calculé sur la base de 48,26, on obtient 62 fr.73 de l'heure, alors que sur 52,50 on a 68,25, soit une différence de 5 fr.52, qui passeront dans la poche du patron.
Ainsi, l'ouvrier qui,
pour un coefficient de production de 130%, touchera 62,73, sera
payé,
par rapport au minimum vital garanti, au coefficient de production de
100 x
62,73
--------------- = 119,4 % 52,5O
De plus, la loi
rétablit
le plafond du boni à 133%. Les cégétistes ont
découvert
que c'était pour saboter la production. N'est-ce pas
plutôt
pour saboter le pouvoir d'achat des travailleurs ? La production des
ouvriers
ne sera pas réduite, les contremaîtres continueront
toujours
à exiger le même nombre de pièces. Mais le boni
réalisé
au-dessus de 33% ne sera pas payé. En outre, c'est la porte
ouverte
au sabrage des temps, car le gouvernement n'interdit pas de travailler,
mais de gagner "trop". Sans ces conditions, nos salaires ne compenseront même pas les prix en vigueur avant la nouvelle hausse en cours. Du reste, le gouvernement avoue sa volonté de poursuivre cette politique de vie chère en refusant toutes garanties réelles du pouvoir d'achat des travailleurs. C'est pour cela, la lutte pour l'échelle mobile est plus que jamais à l'ordre du jour. Henri
DURIEUX.
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