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Nouvelle série -- N°2 |
19 janvier 1950
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Prolétaires
de tous
les pays, unissez-vous !
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Quelle signification attribuer
au juste aux incidents provoqués, le 15 janvier, à Ivry,
par des groupes R.P.F. ?
L'Humanité ayant parlé, à ce sujet, du "raid motorisé de 1.500 hommes de main de M. De Gaulle", la presse bourgeoise, dont Le Monde, s'est hâtée de diminuer l'importance de l'affaire, en reprenant la version officielle du Commissariat de Police qui qualifie de "légers incidents" les bagarres entre les vendeurs R.P.F. et P.C.F. Bien sûr, les informations données par L'Huma sont presque toujours mensongères et nous ne pouvons pas davantage croire la police qui ne le lui cède en rien et qui, dans le cas présent, a intérêt à minimiser les choses.
Mais, en fait, peu importe
que l'affaire ait pris les proportions décrites par L'Humanité
ou que tout se soit réduit à de "légères
escarmouches",
selon l'expression du Monde. Car les deux versions concordent
quant
au principal. Les détails suivants du communiqué officiel
:
ne confirment-ils pas le caractère de raid militairement organisé de l'entreprise R.P.F. ? Peut-on parler, dès lors, "d'incidents entre vendeurs", quand ceux du R.P.F. étaient étrangers à la localité et arrivés en camions ? N'est-ce pas là, au contraire, une tactique typiquement fasciste ? Ce ne sont pas les vendeurs de journaux qui constituent l'objectif principal d'une telle mobilisation. Elle a pour but, tout d'abord, en se rendant maîtresse de la rue, d'intimider la population ; puis, si celle-ci ne réagit pas, les groupes paramilitaires fascistes attaquent, pour commencer, les journaux et les locaux ouvriers. Si cela réussit, on procède, ensuite, de la même façon contre tout adversaire, quelle que soit sa couleur. Au bout du compte, le pays est submergé par un régime totalitaire. C'est ainsi qu'ont procédé, à l'instar de Hitler et de Mussolini, les groupements paramilitaires en France avant guerre, depuis le 6 février 1934. Après les incidents de Grenoble --qui coûtèrent la vie au militant P.C.F. Voitrin--, devant l'indignation soulevée dans le pays par la manière d'agir de ses acolytes, De Gaulle proclama hypocritement son attachement à la légalité. "Nous n'irons pas sur les barricades", répétait-il encore récemment. Mais, quand on veut imposer un régime personnel, il n'y a pas d'autre voie que le lutte armée contre la classe ouvrière : le raid contre une ville aussi ouvrière qu'Ivry confirme le caractère de parti fasciste du R.P.F.
Mais la population d'Ivry
a repoussé l'attaque.
relate Le Monde. Au bout d'une heure et demie, les nervis du R.P.F. ont dû se retirer sans avoir pu s'attaquer aux locaux ouvriers. Pour éviter que ce faits se reproduisent, L'Humanité réclame maintenant à grands cris la dissolution, par l'Etat, des groupements fascistes. Curieuse conclusion ! D'après L'Humanité elle-même, la police n'a fait qu'assister, passive, à la tentative fasciste. Car l'Etat capitaliste et son gouvernement ont trop besoin des troupes paramilitaires contre le mouvement ouvrier. Si la police intervient dans de pareilles circonstances, c'est seulement pour protéger les gangsters fascistes quand les ouvriers menacent d'avoir le dessus.
Pour riposter efficacement
aux attaques terroristes qui se reproduiront et s'étendront
à
tout le pays - car elles font partie du plan de De Gaulle de lutte pour
le pouvoir - les travailleurs ne peuvent compter que sur
eux-mêmes.
En se groupant sur le plan de la localité et du quartier, sans
distinction
de tendances, pour la défense de leurs journaux et de leurs
locaux,
ils ne doivent en aucun cas laisser les fascistes devenir les
maîtres
de la rue. Sinon c'en serait fait de leur liberté et de leur
possibilité
de défendre leurs salaires contre les patrons. Plus de
grèves
possibles là où les fascistes sont maîtres de la
rue.
Il faut aussi que les travailleurs imposent à leurs propres dirigeants staliniens et blumistes de rompre avec la bourgeoisie dans les actes et non seulement dans les paroles. Car qui a contribué à rendre De Gaulle autrement dangereux que ne l'était avant la guerre un de La Rocque ou un Doriot renégat, sinon ces dirigeants, en le sacrant "symbole de la Nation" sous l'occupation, en devenant ensuite ses otages au gouvernement et en acceptant ses referendums bonapartistes ? A. MATHIEU.
Le gouvernement qui, en faisant
traîner en longueur le vote des conventions collectives, avait
espéré
que ce serait autant de gagné pour les capitalistes, est pris
maintenant
entre deux feux. Un peu partout, les travailleurs s'impatientent et
réclament,
par des débrayages, les 3.000 FR. PAR MOIS ET POUR TOUS, en
attendant
le vote de ces conventions par le Conseil de la République
(l'ancien
Sénat). Et Bidault et Cie, grands partisans de la "paix
sociale",
qui escomptaient remplacer tranquillement le blocage des salaires par
le
minimum vital à 9.500 fr., sont obligés, par le mouvement
ouvrier, ou de faire des concessions ou de hâter un vote qu'ils
auraient
voulu le plus tardif possible.
Mais tandis que la volonté de lutte des travailleurs ne se dément pas, la volonté de combat du patronat se confirme, elle aussi. Après les lock-out d'Hispano-Suiza, Bessonneau, Latil, Morane, etc., le conflit de l'"Ile-de-France" en dit long sur l'état d'esprit de la bourgeoisie. Le personnel navigant de ce navire ayant déclenché, le 15 janvier, pour obtenir les 3.000 fr. notamment, une grève d'avertissement qui n'aurait retardé le navire que de 5 heures, s'est vu lock-outé. La Compagnie a décidé de désarmer le navire qui ne pourra reprendre son service normal que le 2 février. Ce fait est révélateur de l'état d'esprit de nombreux patrons, puisque les pertes subies par la Compagnie du fait du lock-out sont relativement beaucoup plus élevées que dans toute autre industrie. Dans ces conditions, les travailleurs voudraient bien comprendre pourquoi les centrales syndicales les laissent s'engager dans des conflits dispersés, pourquoi elles ne leur présentent aucun plan d'action d'ensemble ? La grève générale du 25 novembre n'a-t-elle pas démontré, en même temps que leur volonté de lutter ensemble, l'efficacité d'une telle lutte ?
Voilà une question
à laquelle les travailleurs doivent obtenir, coûte que
coûte,
une réponse de leurs dirigeants, s'ils veulent entrer avec le
maximum
de chances dans une bataille qui est inévitable.
Dans notre précédent
numéro, nous avons fait ressortir, à propos des nouvelles
conventions collectives et du minimum vital ramené par le
gouvernement
de 12.500 à 9.500 francs, l'importance décisive qu'il y
avait
d'imposer un véritable minimum vital.
"Les avantages spéciaux à chaque branche d'industrie, disions-nous, ne peuvent devenir une réalité pour les intéressés que si, au préalable, la classe ouvrière arrache un minimum vital calculé par les organisations syndicales." Qu'est-ce à dire ? Cela veut dire que sans minimum vital garanti à un taux suffisant on aboutirait à la situation suivante : tandis que l'ouvrier métallurgiste, en luttant pour le retour à l'indice 20 par rapport au 1er trimestre de 1939 (166 francs de l'heure pour un manoeuvre), pourrait imposer ce taux ou tout au moins augmenter son salaire actuel, puisque la situation de son industrie est des plus favorables, le petit fonctionnaire continuerait à toucher moins de 15.000 francs. Ailleurs encore - et cela concerne des millions de travailleurs - l'ouvrier verrait son salaire diminuer en raison d'une situation défavorable (chômage ou dispersion dans de petites boîtes). La classe ouvrière se trouverait donc divisée et affaiblie. Mais la revendication d'un véritable minimum vital est aussi importante pour l'ouvrier des industries actuellement privilégiées que pour l'ouvrier le plus mal payé. Quel que soit le niveau du salaire de base du métallurgiste, par exemple, ce salaire tomberait en dessous du minimum vital en cas de réduction massive des heures de travail. En perdant de vue le minimum vital, par suite d'une conjoncture favorable pour son salaire de base, le travailleur métallurgiste se réserverait de difficiles lendemains. En donnant moins d'importance dans l'agitation au véritable minimum vital qu'elle fixe à 19.000 francs par mois, la C.G.T. prend une voie dangereuse pour les travailleurs.
Pour éviter que
la situation de la classe ouvrière empire dans la période
qui vient, à la revendication de la revalorisation des salaires
au niveau du premier trimestre de 1939, selon les indices officiels, il
faut lier indissolublement la revendication du minimum vital à
19.000
francs.
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