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Déclaration du GET concernant le livre de Robert Barcia (alias Hardy) et Christophe Bourseiller:
La véritable Histoire de Lutte Ouvrière
(13 mars 2003)
  




AUX «ORIGINES» DE LUTTE OUVRIERE:
LA MYSTIFICATION DE ROBERT BARCIA

    Le GET (Groupe d'étude trotskyste) qui a été à l'origine de la réédition des textes et des documents de Barta et de l'Union communiste (1939-1950) entend réagir au recueil d'entretiens de Robert Barcia (alias Hardy, principal leader du mouvement d'Arlette Laguiller), avec Christophe Bourseiller intitulé La Véritable histoire de Lutte ouvrière.
    Il ne s'agit pas d'ouvrir une polémique avec Robert Barcia et Lutte ouvrière. Mais de rétablir (en partie!) les événements tels qu'ils se sont déroulés, documents à l'appui. Les faits sont anciens et méconnus. Mais il ne saurait pour autant être question de laisser instaurer en vérité «historique» une version intentionnellement faussée de l'histoire. Pour le passé, mais aussi pour le futur. A bricoler l'histoire, on injurie l'avenir.
    S'agissant des souvenirs du dirigeant d'un parti, on ne peut que déplorer le faible niveau politique de son propos. Ni analyse, ni éclairage. Le lieu commun en guise de lanterne. Mais c'est son affaire et celle des militants de Lutte ouvrière.
On est aussi surpris que la moitié des pages de la «véritable histoire» de LO soient consacrées à Barta et à l'UC (1939-1950), le petit groupe trotskyste à l'initiative de la grève Renault d'avril-mai 1947 qui provoqua l'éviction des ministres communistes du gouvernement Ramadier.
    Robert Barcia (Hardy) n'a pesé de rien à l'UC (1939-1950) où il n'a guère fait que passer de l'âge de 16 à 19 ans. Ce qu'il en dit est fondé sur des souvenirs approximatifs ou des informations de seconde main. Ses propos sont mensongers pour une part, biaisés pour une autre et inconsistants pour l'ensemble.
    Ses erreurs sont multiples. C. Bourseiller fait commencer l'occupation allemande en octobre 1939 (p.9); le local de la rue de la Grande Chaumière n'était pas le domicile de Jacques Ramboz (p.86); Barta n'est pas décédé en région parisienne (p.83), mais en Espagne; Lucienne, dont il est question p.188, ne s'est jamais nommée Jeanne. Irène et elle n'ont pas été arrêtées en 1939 (p.188) mais le 15 janvier 1940; l'occupation de la Sorbonne n'a pas commencé le 3 mai 1968 (p.211) mais après sa réouverture le 13 mai; lors de la dissolution des groupes «gauchistes» en juin 1968, «Alain Krivine [n'a] pas été inquiété» assure Barcia (p.216). Il a été emprisonné 40 jours et son sursis a été révoqué. Liste non exhaustive. Vite dictée, vite écrite, mal relue, La Véritable Histoire de Lutte ouvrière n'est pas un travail sérieux.
    A l'initiative d'un petit noyau de militants, la totalité de la presse de l'UC et les documents concernant son histoire ont été republiés de 1991 à 1995. Lutte ouvrière les tenait sous le boisseau depuis 30 ans, s'arrogeant le droit d'en éditer quelques bribes en occultant le nom de Barta, leur auteur, et s'en attribuant implicitement la paternité. Trois volumes (La Lutte de Classes -1942-1945-, La Lutte de Classes et La Voix des Travailleurs -1945-1947-, La Voix des Travailleurs et La Lutte de Classes -1947-1950-) sont parus aux Editions La Brèche (27 rue Taine, 75012 Paris). D'autres textes ont été édités par le Centro Pietro Tresso (Florence) et le GET (BP 12, 92262 Fontenay-aux-Roses Cedex). Tous sont consultables sur le site http://unioncommuniste.free.fr . Les introductions à ces publications retracent la véritable (!) histoire de l'UC, fondée sur les textes et les documents.
    En 1972, suite à la parution d'une brochure (Jacques Roussel, Les Enfants du Prophète, Editions Spartacus) faisant de LO le prolongement de l'UC et reprenant sa version de la grève Renault d'avril-mai 1947, Barta avait publié une Mise au point: «Sous la plume de Roussel transparaît une version du passé qui est celle des dirigeants de Lutte ouvrière qui prétendent continuer sans Barta (tout en s'appropriant ses actions et ses écrits) ce que Barta leur a soi-disant enseigné». Barcia (Hardy) avait alors répondu par un texte qui rayait Barta de l'histoire et dont la bassesse avait amené Louise Barta (Irène) à réagir. Ce n'est donc pas d'hier que la volonté de R. Barcia de fonder son autorité sur un passé usurpé se manifeste. Tous les documents le démontrant sont disponibles (Barta, Lettres à un jeune camarade, GET).
    Dans ses entretiens avec Bourseiller, Barcia poursuit les mêmes objectifs avec les mêmes méthodes. Sa version des événements qui menèrent à la disparition de l'UC en 1950 est erronée, pour dire peu. Ses allégations concernant les démarches entreprises ultérieurement par Voix ouvrière (groupe fondé par Robert Barcia en 1956, remplacé par Lutte ouvrière après sa dissolution en 1968) pour convaincre Barta de la rejoindre sont affabulations. Ayant quitté l'UC et n'y ayant pas laissé son empreinte, peut-être R. Barcia n'a-t-il pas eu connaissance à l'époque de l'appel aux anciens de l'UC, resté sans réponse, que lancèrent Barta et Irène (en décembre 1950) à une «collaboration, même en dehors de liens organisationnels» face au risque de déclenchements d'un nouveau conflit mondial (Lettre du 3 décembre 1950, Lettres à un jeune..., op. cit. p.24).
    «Par la suite, en 1956, pendant la crise ouverte par Suez, j'ai essayé de publier un bulletin ronéotypé avec Hardy» écrit Barta. «Mais je me suis heurté aux mêmes difficultés qu'avant: le manque d'«horizon» socialiste véritable, disons-le, de culture (car il n'y a pas de dirigeants socialistes sans culture véritable)» (Lettre à J-P. B. 16 mars 1976, Lettres à un jeune… p.17).
    Impossible, enfin, de ne pas citer l'impudente fin de non recevoir de Pierre Bois à Barta à qui, en 1965, il avait proposé une collaboration, semble-t-il sans l'aval de Hardy: «Après avoir rediscuté des dates de réunion du Comité de rédaction, nous n'avons pu trouver d'autre jour que le samedi matin qui puisse convenir à chacun. Je regrette beaucoup que ce détail important soit un obstacle à ta collaboration» (Pierre Bois à Barta, 2 mars 1965, Lettres à un jeune… p.36). «Je suis prêt à examiner toute proposition qui permettrait une collaboration efficace» répondit Barta, «Mais plutôt que des obstacles matériels, ce sont, je crois, des obstacles politiques qui empêchent cette collaboration» (Barta à P. Bois, 11 mars 1965, Lettre…, p.36). Courrier resté sans réponse.
    Irène dément eu le rôle que lui prête R. Barcia dans les débuts de Voix ouvrière. Avec quelques anciens de l'UC, elle a soutenu des camarades alors jeunes malgré ses réserves et ses désaccords, refusant tout rôle politique (elle dactylographiait les tracts) Comme tous les anciens de l'UC, à l'exception de Pierre Bois et de sa compagne, elle a par la suite rompu avec Hardy et Voix ouvrière en déplorant le caporalisme et la vulgarité de ses méthodes.
    Tentative de conférer un fondement «historique» usurpé à son autorité ou volonté de relancer l'agitation médiatique autour de son organisation, le livre de Robert Barcia (alias Hardy) est une imposture sans valeur historique ni politique. Bien mal inspirés seraient les historiens qui s'y fieraient.
      Pour le GET,
Richard Moyon