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chronologie 1946 |
N°59 |
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22 MARS 1946
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Mais la phraséologie démocratique des chefs staliniens n'était que du jésuitisme : ils protestaient contre la CONSECRATION JURIDIQUE d'un état de choses qu'ils avaient eux-mêmes contribué à instaurer : L'ECRASEMENT DES CLASSES LABORIEUSES PAR L'ETAT BUREAUCRATICO POLICIER DE LA BOURGEOISIE (voir Lutte de Classes N° 56, décembre 45, "HERVE LE JESUITE"). Or la marche réelle de la lutte entre classes possédante et exploitée qui sépare tôt ou tard, mais infailliblement, le vrai du faux, le réel de l'apparent et vérifie ainsi les positions de chaque Parti, nous apporte au-jourd'hui la confirmation de notre position à l'égard du "démocratisme" stalinien. Les mêmes causes qui ont provoqué le départ de De Gaulle ont amené un déplacement de l'axe gouvernemental du P.S.-M.R.P. (appuyé sur De Gaulle) au P.S.-P.C. Le projet de constitution est élaboré actuellement par une majorité "socialiste-communiste". Or que voyons-nous ? Le nouveau projet de Constitution ressemble comme deux gouttes d'eau à celui élaboré par le P.S.-M.R.P.. (la seule question litigieuse, celle de "l'école libre", ayant constitué un point de divergence également entre P.S. et M.R.P. du temps de leur collaboration). Cette continuité est tellement évidente que, pour détourner l'attention du caractère peu reluisant de leur activité "constitutionnelle", Duclos et Hervé, qui auparavant ne trouvaient pas de mots assez forts pour critiquer l'oeuvre du P.S.-M.R.P., affectent maintenant l'indifférence ("ce qui compte, c'est voter une Constitution au plus vite") et écrivent (Huma 17-2) : "...si le fascisme devait par nos erreurs menacer la République, ce n'est pas une Déclaration quelconque qui nous sauverait de sa tyrannie". Bien entendu, ce n'est pas la manière de formuler une Constitution, qui consacre la propriété capitaliste, qui peut nous défendre contre le fascisme, instrument politique du Capital. Mais la Constitution en question mesure néan-moins la déchéance du parlementarisme bourgeois et démasque le véritable visage de ses auteurs. Car si les Duclos et les Hervé peuvent minimiser l'importance d'une Constitution "qui ne peut plus avoir l'esprit de celle de 1789" (c'est-à-dire BOULEVERSER les rapports de propriété), ils ne pourront pas tromper les ouvriers sur le fait que la loi électorale qu'ils préparent, constitue un attentat anti-démocratique REEL contre les masses. |
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De ce parlementarisme d'avant 1939, les masses étaient en réalité séparées par mille barrières -et il n'était en fait que l'instrument des capitalistes et des spéculateurs. Mais les chefs ouvriers traîtres, dont tous les efforts visent à maintenir les masses exploitées dans la résignation et la soumission, afin qu'ils puissent conserver leur situation privilégiée, leurs sinécures de députés, de ministres, de maires, de conseillers, ont peur même de ce parlementarisme : ils craignent que, dans les prochaines élections, les ouvriers, qui se détournent d'eux, n'aient la possibilité de voter pour des fractions prolétariennes non-inféodées à la bourgeoisie. C'est pour empêcher ce revirement qu'ils veulent supprimer la liberté de candidature et limiter le choix aux Partis actuels. SI DE GAULLE A UTILISE LE PLEBISCITE POUR ARRIVER A SES FINS BONAPARTISTES PERSONNELLES, CONTRE LES PARTIS OUVRIERS, LES BUREAUCRATES OUVRIERS VEULENT INSTAURER LE MONOPOLE DES ELECTIONS COMME UN INSTRUMENT BONAPARTISTE CONTRE LES TENDANCES PROLETARIENNES REVOLUTIONNAIRES. Car à droite, les partis réactionnaires, le P.R.L. par exemple, avec l'appui de la bourgeoisie, peuvent assurer leur candidature, quelles que soient les conditions exigées. La bourgeoisie s'accommode aujourd'hui de la
domination parlementaire des Partis "ouvriers" parce qu'ils remplissent
par ailleurs, dans les usines, le rôle d'étrangleurs du
mouvement ouvrier
et parce qu'ils peuvent seuls, dans la situation présente,
imposer
des sacrifices à la classe ouvrière. Mais ce travail
-l'écrasement du mouvement ouvrier- ne peut être
mené d'une façon conséquente
et définitive que par le fascisme, qui réalise la
suppression
de tout système représentatif, de tous les Partis, de
toutes
organisations indépendantes. Au-jourd'hui, le fascisme est
encore
trop faible pour que la bourgeoisie puisse y avoir recours. Mais en
étranglant,
d'un côté, le mouvement ouvrier et en supprimant, de
l'autre
côté, le parlementarisme représentatif qui
était
la base et la justification des Partis, les chefs "ouvriers" ouvrent la
voie
à la montée fasciste dont le but est la destruction des
Partis
par la dictature d'un "homme à poigne" ou d'Un Parti fasciste :
"A
quoi bon plusieurs Partis, puisque le Parlement ne sert à rien
?"...
La suppression de la libre candidature par des Partis visant à
faciliter
leur réélection, facilite à son tour la
suppression des Partis qui se forment et existent sur le terrain du
parlementarisme.
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Le fascisme bénéficie non pas des votes, mais de l'appui que lui accorde la bourgeoisie pour qu'il fournisse ses troupes de choc contre le prolétariat. Aujourd'hui que le P.R.L. est encore trop faible, il fait ses meetings sous la protection de la police du "socialiste" Le Troquer. Demain, quand le P.R.L. s'attaquera aux meetings ouvriers, la police NE VIENDRA PAS PROTEGER CEUX-CI. Le fascisme ne peut, d'un autre côté, gagner la sympathie populaire et croître en tant que mouvement de masses, que parce qu'il est alimenté par la politique des chefs "ouvriers" dirigée contre les masses travailleuses, qui discrédite et compromet les Partis ouvriers. Céder au chantage des chefs "ouvriers" ("votez pour nous"), c'est leur permettre de se prévaloir des votes ouvriers pour justifier la continuation de leur politique. Mais si nous nous désolidarisons des dirigeants traîtres en leur signifiant un vote de blâme, et QU'EN MEME TEMPS NOUS BRISONS ET DESARMONS LES BANDES FASCISTES, nous pouvons sortir de l'impasse. D'un côté, organiser contre les bandes fascistes la lutte physique et les empêcher de se réunir ; d'un autre côté, empêcher nos propres dirigeants pourris d'étrangler le mouvement ouvrier, lutter avec esprit de conséquence contre le capitalisme affameur, pour les revendications ouvrières, c'est là la seule façon d'écraser la réaction. Par contre, si nous ne menons pas cette lutte directe contre le patronat et le fascisme, aucun vote au monde ne nous sauvera, comme l'ont bien montré l'exemple de l'Allemagne et de l'Italie. Si nous ne cédons pas au chantage des dirigeants pourris, si nous nous désolidarisons d'eux, si nous leur signifions notre mécontentement par un vote de blâme, si nous protestons par un vote blanc contre leur système électoral anti-démocratique, qui vise à éliminer les combattants prolétariens, et qu'en même temps nous détruisons par la force les bandes fascistes et luttons avec esprit de conséquence pour nos revendications, nous écraserons la réaction en même temps que nous nous débarrasserons des dirigeants traîtres dont la politique prépare la voie du fascisme.
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La guerre que Londres et Washington
ont menée contre l'Allemagne n'a été qu'une
étape dans leur lutte pour la domination du monde, leur lutte
contre Hitler n'a visé qu'à établir leur propre
barrage contre l'U.R.S.S. Aujourd'hui le discours de Churchill donne le
signal du regroupement des
forces capitalistes contre l'U.R.S.S. au nom de la "démocratie".
Mais
derrière ce masque, c'est la même lutte qu'a menée
Hitler
: celle du capitalisme pourrissant contre le système de
l'économie
planifiée. Déjà devant
l'intervention allemande, tandis que Staline faisait appel à
Churchill et à Roosevelt ,
nous di-sions aux travailleurs : "Les ennemis de l'Union
Soviétique sont les capitalistes du monde entier et leur
soutiens... Les alliés de l'Union Soviétique sont en
premier lieu les ouvriers des pays impérialistes...
Aux ouvriers... incombe la tâche... d'écarter les dangers
futurs
que l'impérialisme prépare à l'U.R.S.S., par la
prise
du pouvoir dans leur pays respectif. Les paysans, partout
écrasés par le militarisme, aideront les ouvriers
à émanciper pour
toujours la société, des guerres que
l'impérialisme
fait naître... Mais ce n'est pas Staline, qui restaure en U.R.S.S. le monde bourgeois (popes, maréchaux, ministres), ce ne sont pas les partis staliniens, qui ne sont plus dans tous les pays que des partis bourgeois de "gauche", qui peuvent obtenir l'appui des forces révolutionnaires. Seule la IVe Internationale peut soulever et soulèvera les forces révolutionnaires, prolétariennes, paysannes et anti-colonialistes du monde entier. Les représentants de la bourgeoisie et la clique bonapartiste de Moscou peuvent comploter contre la IVe Internationale et présenter ce complot -parce qu'ils détiennent encore tous les moyens entre leurs mains- comme une lutte de la "légalité" contre "l'illégalité". Mais parce que la politique de la IVe Internationale représente les intérêts des classes opprimées, ce dont les ouvriers se rendent compte tous les jours davantage, les complots de la minorité exploitante contre l'union entre les masses travailleuses et la IVe Internationale échoueront. La lutte entre la paix et la guerre
est une course de vitesse entre la révolution et la
contre-révolution, entre la IVe Internationale et les
maîtres du monde capitaliste.
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Les capitalistes aiment cacher leurs menées sous des
étiquettes idéologiques.
Alors que les financiers et les banquiers du pétrole tirent les ficelles de leurs gouvernements dans l'affaire de l'Iran, d'après le ministre anglais Bevin , "les philosophies de la Grande-Bretagne, des Etats-Unis et de l'U.R.S.S., si différentes qu'elles soient, pourraient s'adapter si les nations étaient patientes...". Le ministre américain Byrnes prétend que, "dans un conflit idéologique, il est assuré de la victoire"... Au sujet de l'Espagne, on peut lire dans Le Monde du 15-3 : "Il paraît capital pour les Etats-Unis d'éviter le danger de voir l'Espagne redevenir un champ de bataille entre deux idéologies ennemies..." La note des Alliés contre Franco déclare : "Il n'est pas dans les intentions des trois gouvernements d'intervenir dans les affaires intérieures de l'Espagne... et ils espèrent que le peuple espagnol ne tombera pas de nouveau sous le coup des horreurs et des amères expériences de la guerre civile..." Idéologie, philosophie, pacifisme... Mais tandis qu'au sujet de "l'idéologie" de l'U.R.S.S. on parle déjà d'une troisième guerre mondiale, comment "l'idéologie" de Franco n'est-elle qu'une simple affaire intérieure ? Alors que contre la même "idéologie", dans la guerre contre Mussolini et Hitler les Alliés ont versé le sang de dizaines de millions d'hommes, pourquoi ces scrupules devant Franco ? Alors même que la note des gouvernements alliés parlait du remplacement de Franco, aux dernières nouvelles, Londres et Washington recherchent un mode d'entente avec lui, celui-ci "ayant donné des gages" (Monde, 15-3). Cette note elle-même, que tout le monde attendait, ne faisait d'ailleurs que favoriser le remplacement de Franco par quelque autre général moins compromis. Cependant, après la "note alliée" indiquant qu'il "n'est pas dans les intentions des trois gouvernements d'intervenir dans les affaires intérieures de l'Espagne", un républicain espagnol déclare : "On prétend, dans la note, ne pas vouloir se mêler des affaires d'Espagne. Nous sommes convaincus que ce qui a motivé la note, c'est le désir... de mettre la main sur les affaires d'Espagne... Les intérêts économiques et stratégiques ont prévalu sur le principe moral" (Combat, 6-3). Les déclarations "idéologiques" n'arrivent pas à cacher le soutien par les alliés du fascisme en Espagne, en liaison avec la préparation de la guerre contre l'U.R.S.S., et la nature impérialiste de leurs intérêts en Espagne. C'est ainsi que la question espagnole apparaît comme une affaire diplomatique où il n'est plus question du peuple espagnol livré à son bourreau Franco, du fascisme, plaie de l'humanité, et dont on fait le procès à Nuremberg comme d'une monstruosité. Le soutien que les Alliés accordent à Franco contre le peuple espagnol est de même nature que celui dont a bénéficié Hitler. Hitler, pas plus que Franco, n'était le produit du peuple allemand ; c'est le capitalisme international qui a nourri Hitler contre le peuple allemand et contre l'U.R.S.S. "Certes, la libération de l'Espagne sera l'affaire des Espagnols eux-mêmes, écrit L'Humanité du 5-3... Ce que les nations unies ont à faire, c'est de cesser leur aide à Franco contre l'Espagne." C'est ainsi que, du côté des Staliniens, on abandonne également le peuple espagnol à Franco, en prétendant l'éliminer par voie pacifique avec l'aide des "démocraties" qui, elles, nous l'avons vu, ont un intérêt primordial à le maintenir. Ils font appel aux Alliés comme aux amis du peuple espagnol, quand ils ne sont que ses étrangleurs (de même qu'en son temps, ils faisaient passer l'anti-communiste Churchill pour un démocrate ami de l'U.R.S.S.) -parce que pour ces messieurs aussi l'affaire espagnole; n'est qu'une affaire "diplomatique". Eux aussi voudraient remplacer Franco sans toucher au régime franquiste : le gouvernement "démocratique" de Giral projette l'établissement de la "république" par l'élimination de Franco et de la phalange et l'établissement (comme "première étape") d'un gouvernement militaire composé de généraux de toutes nuances politiques" (Monde, 9-1). Une "démocratie" réactionnaire, tel est l'idéal non seulement des "Républicains", mais aussi des "Socialistes" et des "Communistes" ; c'est ainsi que pour réaliser "l'unité nationale" contre le fasciste Franco, le P.C. espagnol s'allie à des fascistes aussi notoires que Gil Roblès et aux monarchistes. Le seul moyen de renverser Franco, c'est de soulever le peuple espagnol contre le régime de terreur et de famine sur les bases duquel se maintient non seulement Franco, mais le capitalisme et tous ses soutiens.
Léon Trotsky écrivait déjà en 1937 : "Le
fond social de la révolution espagnole, au cours des six
dernières années, avait été l'offensive
croissante des masses contre
le régime de la propriété semi-féodale et
bourgeoise.
C'est précisément la nécessité de
défendre
cette propriété par les moyens les plus extrêmes
qui
avait jeté la bourgeoisie dans les bras de Franco -et qui l'y
maintient,
doit-on ajouter". |
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Théorie et pratique
Le marxisme et la révolution
russe
représentent l'union de la théorie et de la pratique ;
l'union entre le mot et le
fait. Chaque tendance à la capitulation devant la classe ennemie
que
nous avons connue dans le passé et nous en avons connu
beaucoup chacune commença par une révision de la
théorie et finit par le renoncement à l'action.
Après le premier accès de victoire en 1917, chaque revers
de la révolution combattante, chaque difficulté, chaque
défaite, apportèrent de nouvelles vagues de
découragement, et avec elles de nouvelles
expérimentations et de nouvelles révisions de la
théorie ; et finalement de nouvelles
capitulations de principes devant la classe ennemie. Le cas du
professeur
Burnham n'en est que le plus récent exemple.Le cas du professeur Burnham est assez récent pour être rappelé. Il commença par une révision de la théorie marxiste de l'Etat et de l'analyse marxiste de la révolution russe, et finit dans le camp de l'impérialisme américain. C'est la capitulation la plus infâme et la plus honteuse dont on puisse être coupable. Elle représente une véritable trahison à l'égard de l'humanité, parce que l'impérialisme américain est l'ennemi de l'humanité. Celui qui passe dans ce camp possède une "religion" dont aucun travailleur, qui se respecte, ne s'infectera jamais. Le stalinisme lui-même débuta par une révision de la théorie marxiste et finit par une trahison de classe. Trotsky commença sa lutte contre Staline dans le domaine d'une dispute théorique au sujet de la théorie révisionniste du "socialisme dans un seul pays" et du renoncement au caractère internationaliste de la révolution russe. Les trotskystes comprirent la nature du stalinisme mieux, l'expliquèrent plus tôt ; le combattirent plus longtemps et plus énergiquement qu'aucun autre. C'est pourquoi personne n'a besoin de nous exciter contre le stalinisme. Mais pour nous, "l'anti-stalinisme" vulgaire n'est pas plus révolutionnaire ni plus attirant. Nous savons où cet "anti-stalinisme" conduit. Jusqu'à maintenant, il a toujours conduit au camp de l'impérialisme "démocratique". Nous ne pouvons avoir aucune querelle, quelle qu'elle soit, avec ceux qui dénoncent le stalinisme pour ses crimes sanguinaires contre les ouvriers et ils sont légion. Mais un zèle excessif à critiquer et à dénoncer l'Union soviétique et ceux qui la défendent encore cette partie d'elle qui vaut d'être défendue contre l'impérialisme est sujet à suspicion. L'antagonisme sans borne frisant la russophobie que l'on peut remarquer dans l'atmosphère ces jours-ci est un sentiment très dangereux, particulièrement en ce moment. Parce qu'il est parfaitement clair pour tout le monde qu'avant qu'aucune paix ne soit conclue, la mobilisation pour la prochaine phase de la guerre, une guerre contre l'Union soviétique, a lieu et s'effectue à un rythme fiévreux. C'est pour elle que les préparatifs se poursuivent ouvertement sur tous les fronts. Le courant anti-soviétique
Qui peut être assez aveugle
pour ne pas les voir et ne
pas les comprendre ? Sur le front diplomatique, l'impérialisme
américain mobilise ses forces et enrôle des alliés.
Sur le front économique, l'impérialisme américain
accorde ou refuse des emprunts et des
crédits pour atteindre ses buts diplomatiques. Sur le front de
la
propagande, aussi, le peuple américain est bombardé d'une
campagne
bien calculée de préjugés pour les préparer
à
une autre guerre de la "démocratie" que Dieu nous aide !
contre
l'Union soviétique. Et même sur le front militaire, nous
lisons
des déclarations effrontées dans les journaux, tous les
jours,
en ce moment, disant que les armées de Tchang Kaï Chek,
engagées
dans la guerre civile dans la Chine du Nord, sont armées,
équipées
et même en partie entraînées par des militaires
américains.Une vague extraordinaire de sentiment public contre la Russie, rappelant les anciens jours de 1917-1919, dont quelques-uns d'entre nous se souviennent, est en train de se mettre en mouvement. L'agitation actuelle rappelle les jours de la guerre finno-soviétique quand, chaque démocrate, chaque libéral, chaque russophobe, chaque anti-stalinien, agitait au service de l'impérialisme américain, le drapeau de la guerre contre l'Union soviétique. Ce fut assez difficile, et il fallut du courage et de l'indépendance de jugement pour résister à cette terrible vague de sentiment et de propagande anti-russe, au moment de la guerre finno-soviétique. Nous voyons la même chose se reproduire aujourd'hui, soutenue tout au long, comme alors, par les crimes bestiaux de Staline. Les crimes de Staline dans l'Union soviétique, en Pologne, en Europe orientale et maintenant en Corée, portent des coups mortels au prestige de l'Union soviétique. Dans les territoires occupés, l'Armée Rouge, sous la direction des staliniens, se comporte de telle façon qu'elle déchire le coeur des ouvriers et les déçoit au sujet de l'Union soviétique, affaiblit leur fidélité et leur amitié pour elle, et ouvre ainsi la voie à une éventuelle et facile mobilisation du monde capitaliste contre elle. Dénonçant ces crimes de toute notre âme, nous devons encore nous efforcer de maintenir notre équilibre, de voir le tableau dans son ensemble, de voir derrière les crimes et la malpropreté du stalinisme, l'Union soviétique et le jalon que les travailleurs du monde y ont encore. Trotsky a prédit que le sort de l'Union soviétique serait décidé dans la guerre. Cela reste notre ferme conviction. Seulement nous ne sommes pas d'accord avec certaines gens qui pensent avec insouciance que la guerre est finie. La guerre n'a fait que traverser une phase et se trouve maintenant dans un processus de regroupement et de réorganisation pour la seconde phase. La guerre n'est pas finie et la révolution qui, avons-nous dit, sortirait de la guerre en Europe, n'est pas rayée du calendrier. Elle a seulement été retardée et ajournée, principalement par l'absence de direction, par l'absence d'un parti révolutionnaire suffisamment fort. Les partisans de la IVe Internationale, dans le monde entier, travaillent à construire cette direction, à construire ce parti. La destinée de la
révolution
La destinée de la
révolution russe n'est pas
encore décidée. Une grand part a été
trahie, mais quelque chose demeure cependant. Le destin final de la
révolution russe est lié à l'issue essentielle de
cette période historique et sera décidé avec elle
ou la chute du genre humain ou son émancipation socialiste
telle est l'issue en présence de laquelle
se trouve l'humanité aujourd'hui.La révolution russe n'apparaît que comme une partie, et même pas la plus grande, d'un gigantesque conflit mondial entre des forces qui ne peuvent pas être conciliées. La révolution russe de novembre 1917 a montré aux travailleurs du monde entier la voie vers le pouvoir, vers le renversement du système de propriété capitaliste, vers la réorganisation de l'économie sur une base rationnelle. Il n'y a pas d'autre voie pour sauver le genre humain à l'échelle internationale que la voie de la Russie. Partant de ce point de vue, nous saluons ce soir la Grande Révolution, comme l'initiatrice et l'inspiratrice des plus grandes choses à venir. C'est en cela que réside son importance. Si nous envisageons la révolution russe d'un point de vue exact, nous devons la voir telle qu'elle fut réellement : une action internationale de la classe laborieuse, débutant dans un pays arriéré, le pays le plus arriéré parmi les grandes puissances, la Russie tsariste, et destinée à être achevée dans le pays le plus avancé et le plus puissant : les Etats-Unis d'Amérique. Ce qui a été commencé dans le domaine des Tsars sera terminé dans le domaine des monopoleurs américains. Et sans considérer les victoires ou les défaites dans un pays ou dans un autre, ou même sur un continent ou sur un autre, l'issue centrale de notre époque capitalisme ou socialisme ne sera pas décidée en fin de compte avant qu'elle le soit aux Etats-Unis d'Amérique. La révolution russe n'est pas tombée du ciel. Elle a été prévue et préparée. De même sa continuation en Amérique, la révolution américaine doit être prévue et préparée également. De même que les bolcheviks russes nous ont donné l'exemple d'une révolution victorieuse, ils nous ont aussi donné l'exemple d'un parti fait pour diriger et organiser la révolution. Si nous prenons le parti bolchevik russe comme exemple et il n'existe pas d'autre exemple méritant même qu'on en parle cela veut dire un parti qui est d'un marxisme orthodoxe dans sa théorie, qui est strict quant aux principes et fort dans son unité et sa discipline. Seul un tel parti est qualifié pour organiser et conduire une révolution. Nous nous préparons
Nous nous efforçons de
construire un tel parti aux
Etats-Unis, et nous vous invitons à vous joindre à nous
pour accomplir cette
tâche. Si vous pouvez prévoir, comme nous le faisons, les
grandioses
perspectives de la révolution américaine, nous vous
invitons
à vous joindre à nous pour la préparer.Dans les premières années qui suivirent la révolution russe, l'Union soviétique n'aurait pas pu survivre sans le soutien des travailleurs des pays capitalistes. L'Union soviétique ne peut pas survivre maintenant non plus sans ce soutien. Mais maintenant la question se pose quelque peu différemment. Maintenant la révolution chez eux est une question absolue de vie ou de mort pour les travailleurs des pays capitalistes. Il n'est plus pour eux simplement question d'arrêter ou d'essayer d'arrêter une intervention contre l'Union soviétique. Mener jusqu'au bout le genre de révolution qui fut faite en Russie en 1917 est une question de vie ou de mort pour eux. Il s'agit de se débarrasser du capitalisme avant que le capitalisme détruise l'humanité. C'est une question absolue de vie ou de mort pour les travailleurs dans les pays capitalistes, y compris celui dans lequel nous vivons. En dehors de la révolution socialiste, il n'y a pas de salut pour nous. C'est ici, aux Etats-Unis, que se trouve la plus grande puissance impérialiste, un monstre exploitant et opprimant le monde entier. C'est vrai, et nous en tenons pleinement compte. Mais ici aussi il y a une puissance encore plus grande c'est la classe ouvrière américaine militante et invaincue. Une grande responsabilité historique repose à coup sûr sur nos épaules. Les deux plus grandes puissances du monde la puissance du mal et de la destruction et la puissance de régénération et de salut du genre humain sont ici toutes deux. Il n'y a pour nous qu'une seule voie pour faire notre devoir : c'est de prévoir la révolution et de la préparer. Et la manière de s'y préparer, c'est d'aller vers les travailleurs américains avec le message du parti. Allez à cette source de puissance qui est plus grande même que la puissance de l'impérialisme américain et enseignez aux travailleurs la leçon de la révolution russe. Organisez-les et inspirez-les. Conduisez-les vers la victoire du socialisme en Amérique, qui assurera la victoire du socialisme dans le monde entier. |
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"Les
révolutions prolétariennes... interrompent à
chaque instant leur propre cours, reviennent sur ce qui semble
déjà être accompli pour le recommencer de nouveau,
... paraissent n'abattre leur adversaire que
pour lui permettre de puiser de nouvelles forces de la terre et se
redresser de nouveau formidable en face d'elles, reculent constamment
à nouveau devant l'immensité infinie de leur propre but,
jusqu'à ce que soit créée enfin la situation qui
rende impossible tout retour en arrière et que les circonstances
elles-mêmes crient : ...c'est ici qu'il faut sauter !"
Il est bon, en ce 72° anniversaire de la Commune de Paris, de rappeler cette caractéristique des révolutions prolétariennes donnée par Marx en 1851. Les voies de l'histoire et surtout la voie prolétarienne, ne sont pas une ligne droite qu'on parcourt d'un seul trait à une certaine époque et qui assure, avec de lourds sacrifices, la victoire ou la défaite. Pour celui qui considère les événements seulement dans la période qui coïncide avec sa propre expérience, la courbe historique semble par moments redescendre à son point de départ ; mais pour ceux qui les considèrent dans leur TOTALITE HISTORIQUE, cette courbe indique la marche inéluctable du prolétariat vers le pouvoir et de la société vers le communisme. A l'aube de la révolution prolétarienne qui est la Commune de Paris (18 mars-28 mai 1871) le soulèvement des ouvriers ne fut pas un acte délibéré, préparé à l'avance dans un but socialiste défini. Le soulèvement parisien eut lieu devant la pourriture avérée de la bourgeoisie française, à l'occasion d'une guerre que celle-ci avait déchaînée et perdue et de laquelle elle voulait se tirer sur le dos des ouvriers et des paysans français Il manquait au mou-vement la conscience révolutionnaire. Dominée par les éléments petits-bourgeois, sans parti révolutionnaire, la Commune fut noyée dans le sang. La bourgeoisie décima le prolétariat pour le briser à jamais. Mais la croissance même du capitalisme recréa une classe ouvrière qui sut utiliser les nouvelles conditions politiques et économiques pour panser ses plaies et conquérir des droits économiques et politiques. Notamment, il forgea ses propres organisations de classe, syndicats et partis politiques. La leçon de la Commune ne fut point perdue pour le prolétariat. Les marxistes de tous les pays examinèrent les fautes commises par ses dirigeants ; et quand par suite de la guerre russo-japonaise de 1904 éclata la première révolution russe de 1905, le Soviet de Pétrograd ne renouvela plus les fautes de la Commune de Paris. Cependant, la première révolution russe fut elle aussi battue. Il fallut la première guerre im-périaliste mondiale, qui sembla tout d'abord avoir emporté toutes les conquêtes et tout l'acquis politique de la classe ouvrière, pour que la révolution d'Octobre 17 sous la conduite du parti bolchévique créât le premier Etat ouvrier qu'ait connu le monde. Mais la révolution russe resta isolée dans un monde capitaliste. Ceci entraîna la mainmise sur l'Etat ouvrier d'une bureaucratie étrangère à la révolution, bureaucratie de plus en plus privilégiée et hostile au socialisme qui, se couvrant faussement du drapeau de la révolution d'Octobre pour mieux tromper les masses, conduisit le prolétariat, de défaite en défaite, à la situation inextricable provoquée par la deuxième guerre impérialiste mondiale. Il semble à nouveau que le prolétariat ait tout perdu. Mais la main-mise de la bureaucratie sur la IIIè Internationale provoqua d'abord l'opposition des éléments révolutionnaires à sa politique conservatrice et ensuite la création d'une nouvelle internationale révolutionnaire, la IVe Internationale. Quoiqu'il reste dans le monde entier peu de pays où la classe ouvrière conserve des organisations à elle (Angleterre, Etats-Unis) et que leurs dirigeants soient passés à la bourgeoisie, trois facteurs assurent cependant la victoire définitive du prolétariat et des masses exploitées sur le capitalisme. Premièrement la situation inextricable pleine de contradictions et de dangers dans laquelle se trouve le capitalisme, contraint à une lutte permanente contre les masses de tous les pays. Deuxièmement l'existence sur 1/6 du globe d'une économie planifiée qui, bien que mise en danger par la bureaucratie stalinienne, reste encore la dernière mais la PRINCIPALE conquête de la Révolution d'Octobre 17. Et enfin, l'existence de la IVe Internationale, parti prolétarien révolutionnaire mondial qui affirmera dans la période révolutionnaire prochaine la continuité des intérêts et de l'idéologie prolétariennes contre les intérêts et l'idéologie de la bourgeoisie, et mènera les exploités à la victoire finale sur le capitalisme, à la révolution prolétarienne mondiale. |