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chronologie 1947 |
N° 8 |
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3 JUIN 1947
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PERMANENCE Café-Tabac «Le Terminus», angle r. Collas, av. Edouerd-Vaillant Métro : Pont-de-Sèvres |
D'après les
chiffres officiels, la production a doublé depuis un an, et
cependant la situation
des travailleurs n'a fait qu'empirer. En haut lieu on essaie
d'embrouiller
les ouvriers avec des explications "techniques" et des discours sur la
"course
entre les salaires et les prix".
Mais si la situation est catastrophique pour les masses, elle ne l'est pas pour tout le monde. On peut être sûr que les riches, malgré le manque de pain, ont mangé comme d'habitude, le lundi comme le dimanche, aujourd'hui comme hier, et comme demain... si les travailleurs ne réagissent pas. Car l'explication de toute la situation et de toutes les difficultés pour les masses, c'est l'action de tous les gouvernements jusqu'à maintenant, qui ont tous fait une politique en faveur des riches et contre les pauvres. Avec un gouvernement des travailleurs, l'accroissement de la production n'aurait-elle pas tout naturellement amélioré la vie des masses ? Ceci est tellement évident et le mécontentement est tellement grand, que toute la classe ouvrière, en province et à Paris, toute la population, est indignée et veut entrer en lutte. Il a fallu tout l'effort non seulement officiel, mais surtout celui des organisations qui se prétendent encore ouvrières pour que ce mécontentement ne se transforme pas en une grande vague de fond.
Mais le flot
grandit. Lundi matin, plusieurs centaines d'ouvriers et
d'employés ont manifesté devant l'Hôtel Matignon.
Dans notre usine, le secteur Collas et le Bas-Meudon
ont fait une demi-journée de grève, pour riposter
sur-le-champ
contre les manoeuvres du gouvernement. En effet, celui-ci n'a
acculé
à la grève les ouvriers boulangers (dont le travail
pénible
est très mal payé) qu'avec l'arrière pensée
que
cette grève, frappant toute la population, pourrait dresser
celle-ci
contre les grèves en général. La nécessité de cette lutte fait tant de progrès dans la conscience des ouvriers, que les dirigeants cégétistes, qui avaient d'abord présenté la grève générale comme une idiotie, essaient maintenant de la présenter comme une chose prématurée, qu'"on ne sait pas où cela peut nous mener", que ce serait une grève insurrectionnelle, que "la réaction n'attend que ça"... Pourquoi les dirigeants cégétistes nous menacent-ils de la réaction ?
La classe
ouvrière a l'expérience de deux grèves
générales : celle de février
1934 et celle de juin 1936. Dans le premier cas, la grève
générale était destinée
précisément à écraser la réaction,
qu'avaient nourri la passivité et les scandales parlementaires.
Et malgré la constitution de gouvernements comme celui
de Doumergue
ou Laval,
qui étaient des gouvernements réactionnaires, la classe
ouvrière, dans la lutte, a constamment amélioré
ses positions et c'est finalement par la grève
générale de juin 1936, que pour
la première fois elle a arraché les revendications les
plus
immédiates et les plus indispensables à sa vie, les
congés
payés, les quarante heures, l'amélioration des
salaires...
C'est parce que la lutte ultérieure en 1937 et 1938 a
été
sabotée par les directions officielles, que la classe
ouvrière
a reculé ensuite. Il ne s'agit pas d'insurrection. Il ne s'agit, aujourd'hui comme en juin 1936, que de défendre. La politique des cégétistes, c'est le chacun pour soi, alors que c'est seulement une grève générale, ne comprenant pas les services indispensables à la population, qui peut seule faire capituler les capitalistes et le gouvernement. Dans une grève générale des industries non indispensables à la vie de tous les jours, les ouvriers boulangers, par exemple, auraient vu leur salaire augmenté comme tous les autres, sans se mettre en grève.
Les
grèves
perlées et dispersées nous font gaspiller un temps
précieux
; elles énerveront, à la longue, les ouvriers et la
population.
C'est cela qu'attend la réaction et si les représentants,
prétendument ouvriers, sont partisans de ces méthodes,
c'est parce que leur but c'est surtout d'utiliser la lutte
ouvrière pour la réalisation de leurs desseins
ministériels, et non de défendre le pain des
travailleurs.
Comme en juin 1936, la classe ouvrière, tout ensemble, doit repartir du pied gauche !
LA VOIX DES
TRAVAILLEURS.
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La direction
cégétiste n'a pas répondu à notre question
sur les moyens qu'elle entendait mettre en oeuvre pour obtenir les 10
francs à partir du 1° mai.
Cette question devait recevoir une réponse même si elle n'était posée que par une minorité d'ouvriers, à plus forte raison quand elle intéresse, comme c'est le cas, tous les ouvriers de chez Renault. Une telle attitude est intolérable, car ce que veulent les travailleurs c'est que chaque tendance ou fraction, quels que soient les postes occupés, répondent nettement et sans détour aux questions posées par les ouvriers. Il est un moyen pour mettre fin à cette attitude arrogante de la direction cégétiste vis-à-vis des ouvriers, et qui nuit à la lutte d'ensemble. Pour nous, le pain des travailleurs n'est pas une question de rivalité. Ce que nous voulons, c'est l'unité de lutte. Nous proposons, par conséquent, que les représentants, quelle que soit leur appartenance, à condition qu'ils soient dûment mandatés dans des assemblées de base par les ouvriers, se réunissent ensemble pour envisager en commun les moyens d'action dans une situation qui exige qu'on trouve les moyens de défense contre les attaques patronales toujours renouvelées. La section syndicale n'a envisagé qu'une délégation dans les ministères pour protester contre la diminution de la ration de pain décrétée par le gouvernement. Le secteur Collas et le Bas-Meudon ont, par contre, fait une grève de protestation, le lundi, au nom des ouvriers de chez Renault. Plusieurs milliers d'ouvriers représentés par la nouvelle C.E. Collas, le 88, et les délégués d'autres départements, sont prêts à l'unité d'action avec les représentants officiels du syndicat dans la mesure où ceux-ci s'engagent à suivre réellement les désirs des ouvriers de base et proposent des moyens de lutte réellement efficaces.
Assemblées
générales dans chaque département pour mandater
des
responsables nouveaux ou anciens et réaliser, dans les faits et
non
dans les paroles, l'unité de lutte de tous les travailleurs de
chez
Renault !
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Comment conserver
l'unité qui s'est réalisée pendant la grève
? Pour mener la grève
nous avons eu un comité de grève. Mais l'activité
d'un
comité de grève cesse avec la grève.
Certains camarades pensent qu'il faut transformer le comité de grève en comité d'action. Or un comité c'est un organisme qui a une tâche bien définie à accomplir. Il ne peut exister que pour une action bien déterminée. On peut former un comité pour le contrôle des cantines, qui, groupant des ouvriers de toute tendance, s'occuperait du contrôle des cantines. On a pu former un comité d'épuration qui avait la tâche bien précise d'épurer (qu'il l'ait mal fait, c'est autre chose); on peut former un comité de défense ouvrière qui serait chargé de la défense des réunions, des locaux et de la presse ouvrière.
Mais il y a
les
tâches quotidiennes et permanentes du mouvement ouvrier. Il
faut
percevoir des cotisations, avoir un siège pour tenir des
réunions, faire de l'agitation et de la propagande,
établir une liaison constante entre les ouvriers des
différents ateliers et des différentes usines; en un mot
il faut organiser les ouvriers les plus combatifs : cela, c'est la
tâche du syndicat. Et si nous sommes en désaccord avec
le syndicat C.G.T., c'est justement parce qu'il ne remplit pas ses
tâches.
Il perçoit des cotisations ? C'est pour éditer des tracts
de
calomnies contre les grévistes ! Des réunions syndicales
?
On n'en fait pas ou bien on y empêche de parler les ouvriers !
Etablir
une liaison ? Des ateliers limitrophes sont en grève et les
ouvriers
n'en sont même pas informés par leur syndicat ! Le syndicat C.G.T. n'organise pas les ouvriers, il groupe des cotisants. Il nous faut un véritable syndicat, c'est-à-dire un syndicat qui ne soit pas la propriété des bonzes, mais qui soit contrôlé par tous les syndiqués. Ce qu'il faut, c'est d'abord imposer la démocratie. Or, cela on ne peut pas le faire dans la C.G.T. actuelle. Tous ceux qui émettent des opinions contraires à ceux des dirigeants sont évincés. Et même là où une petite opposition peut subsister, elle est toujours prisonnière de la "majorité". C'est ainsi que les camarades de Collas, après avoir élu une commission exécutive à eux, se sont heurtés à l'opposition de la bureaucratie syndicale qui a refusé de les reconnaître. C'est pourquoi cette C.E., provisoirement transformée en comité d'action, a décidé de constituer un syndicat. Certains camarades pensent que la tâche est trop difficile pour l'entreprendre. C'est sous-estimer notre force et surestimer cella de la fraction dirigeante de la C.G.T. En fait, les syndicats n'ont pas toujours groupé des millions de syndiqués. Le syndicat doit grouper et organiser les ouvriers les plus conscients et les plus combatifs. Si aujourd'hui les syndiqués sont nombreux c'est que le syndicat n'exige rien d'eux que 40 fr. par mois. Or, il vaut mieux cinquante syndiqués actifs que deux mille cotisants. Le problème que nous posons n'est pas de faire un syndicat opposé à la C.G.T. Ce que nous voulons c'est RECONSTRUIRE LE SYNDICAT A LA BASE. Nous ne construisons pas non plus un syndicat autonome, ce qui supposerait que nous voulons limiter notre action à la R.N.U.R. : nous sommes partisans d'une seule centrale syndicale, c'est-à-dire de syndicats groupés en fédérations, elles-mêmes groupées en Confédération (C.G.T.). Mais nous considérons qu'actuellement il n'y a pas de C.G.T., il y a seulement une bureaucratie syndicale qui encaisse des cotisations. Nous ne voulons plus payer des cotisations à des gens qui nous trahissent. Pour reformer la C.G.T. sans les bureaucrates, il faut d'abord reconstruire les syndicats de base qui se grouperont ensuite en fédérations, lesquelles s'uniront en confédération. Le travail peut paraître difficile, mais il n'y a pas le choix, car il n'y a pas d'autre voie. Ce qu'il faut, c'est reformer notre syndicat à la base pour établir une démocratie réelle, par un contrôle permanent de la base sur le syndicat. C'est pourquoi les ouvriers du secteur Collas créent le "syndicat démocratique de chez Renault" dont les statuts seront déposés prochainement et portés à la connaissance des travailleurs de la Régie.
Ils invitent
dès maintenant les ouvriers à se joindre à eux.
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Qui sont les provocateurs ? Partout, comme chez Renault, la volonté de grève surgit d'en bas. Le communiqué de la Fédération de l'Eclairage dit textuellement :
"Les
délégués
fédéraux... se sont réunis le samedi 24 mai 1947
porteurs
de mandats pour la greve immédiate et sans limite donnes dans
des
assemblées d'organisations de base" (Humanité, 25-5).
Pour ne pas respecter la démocratie, les dirigeants de la C.G.T. traitent les ouvriers en enfants, tout en mettant en avant leur sagesse et leur "calme". Mais c'est leur "calme" devant les souffrances des ouvriers qui a permis au gouvernement d'ajourner la révision des salaires au mois de décembre et d'utiliser, contre les grèves isolées, des méthodes totalitaires, comme la réquisition militaire. Les capitalistes, eux, ne prêchent pas du tout le calme : par leur porte-parole, le gouvernement, ils opposent aux ouvriers leur volonté et leur force unies. Sans se concerter, d'un bout à l'autre du pays, les travailleurs ont eu recours à la même méthode de lutte : la grève et, en même temps, à la suite de la grève Renault. Tous les efforts des capitalistes, c'est de passer sans trop de dommages à travers cette situation et avec le moins de concessions possible. Si les dirigeants cégétistes s'opposent à la lutte ouvrière gréviste, ce n'est pas par stratégie, c'est parce qu'ils ne savent plus lutter avec les ouvriers. Tout ce qu'ils savent, c'est se déplacer en auto pour se rencontrer avec les potentats de l'industrie ou des ministres, négocier confortablement autour du tapis vert. Ils prêchent le calme, parce qu'ils haïssent la lutte de ceux qui troublent leurs bons rapports avec les capitalistes. Et parce que dans la lutte ouverte, ce ne sont pas eux, mais d'autres qui font le travail de dirigeants. Que deviendraient dans une grève générale leurs grands et petits postes ? Dieu nous en préserve ! Ce sont les travailleurs qui veulent un mouvement d'ensemble, qui ferait capituler rapidement les capitalistes. Ce sont les bureaucrates qui n'en veulent pas. Mais l'attitude des bureaucrates n'a pas nom "stratégie", mais "trahison". Les mois qui viennent décideront du sort de la classe ouvrière pour longtemps. Car ce n'est pas tous les ans que la classe ouvrière se trouve prête, dans son ensemble, à mener la lutte. La trahison de quelques milliers de bureaucrates sera-t-elle plus forte que la volonté de millions et de millions d'exploités ? La fraction dirigeante du syndicat a "soutenu" nos revendications comme la corde soutient le pendu. Les 3 francs n'étaient pas un acompte sur les 10 francs, à partir du 1er mai, comme elle l'a prétendu, mais un appât pour nous faire capituler. Il faut que la direction syndicale qui nous a forcés à la reprise du travail s'explique immédiatement sur les moyens d'obtenir les 10 francs ! Nous examinerons ce qu'elle en dit et nous verrons ensemble ce qu'il faut faire devant la nouvelle situation. Et si la direction cégétiste continue à saboter, comme par le passé, nous envisagerons nous-mêmes les moyens de lutte. Car, depuis notre mouvement, nous nous sommes enrichis d'une grande expérience et nous ne voulons plus nous laisser mener avec des promesses trompeuses. Nous sommes entrés en lutte pour que ça change et ça doit changer. Nos 10 francs à partir du 1er mai ! Minimum vital calculé sur l'indice des prix (Echelle mobile des salaires) !
D'abord que les
candidats
doivent être présentés sur les listes des
organisations
syndicales les plus "représentatives". Or nous savons comment
sont
établies ces listes. Les futurs délégués,
choisis
par la C.E., sont présentés à l'assemblée
générale
du syndicat (une trentaine d'ouvriers, bien souvent moins). Un exemple
nous suffira pour montrer toute l'iniquité de cette
"représentation".
Au secteur Collas, la grosse majorité des ouvriers, écoeurés par les méthodes bureaucratiques et policières des dirigeants syndicaux, ont cessé de payer leurs cotisations. Après la grève, ils se sont réunis pour former une nouvelle C.E., qui a été élue à l'unanimité des ouvriers syndiqués et non syndiqués, à l'exception des dirigeants qui avaient jugé plus sage de ne pas se présenter à la réunion. La section syndicale de la R.N.U.R. a refusé de reconnaître cette C.E. parce qu'elle avait été élue par des ouvriers non à jour de leurs cotisations. Or tous les ouvriers sont des syndiqués, et s'ils refusent actuellement de payer des cotisations c'est qu'ils en ont assez de confier leur argent à des gens qui l'utilisent pour les combattre et les calomnier (voir la série de tracts de la C.G.T. pendant la grève). Mais, pour les dirigeants actuels du syndicat, la volonté d'un millier d'ouvriers mécontents est moins précieuse que celle d'une trentaine de "syndiqués" (lire : cochons de payants). D'après la loi en vigueur, plus de mille ouvriers qui ont prouvé leur combativité pendant la grève ne peuvent pas élire légalement leur représentant, tandis qu'une poignée de jaunes a la possibilité d'élire les siens. En somme, on nous offre une illusion de démocratie. C'est pourquoi, dans ces conditions, il est préférable de ne pas avoir de délégués que d'en avoir de mauvais (ceux qui se substituent au contremaître pour pousser à la production et faire la police dans l'usine). Certains camarades ont pensé, après l'attitude répugnante des dirigeants cégétistes dans notre grève, qu'il fallait faire bloc contre eux aux élections. Certains sont même allés jusqu'à envisager favorablement la proposition de la C.F.T.C. de faire une liste d'union contre les bureaucrates de la C.G.T. Or, il ne peut être question pour nous de faire bloc avec des organisations réactionnaires contre des organisations bureaucratisées. Le problème n'est pas pour nous d'avoir des délégués à tout prix et d'envisager toutes les combines possibles pour faire élire nos représentants. Le problème, c'est d'imposer au patronat et au gouvernement la libre élection des délégués. Hors de cela, nos délégués ne sont que des représentants imposés bureaucratiquement.
C'est pourquoi nous
devons
avant tout engager la lutte pour avoir la possibilité
d'élire
des représentants de notre choix.
2° Nous devons avoir la possibilité d'élire nos représentants par département, car il est absolument anormal que nous soyons appelés à nous prononcer sur des noms que nous ne connaissons pas et qu'on veut nous faire élire bureaucratiquement.
C'est ainsi qu'au
secteur
Collas, les délégués cégétistes
"dans
la ligne" seraient élus par les voix du restant de l'usine
contre
la volonté des ouvriers de ce secteur.
Pour faire échec aux manoeuvres bureaucratiques des "dirigeants" syndicaux qui veulent nous imposer leur candidature, Pour imposer des élections démocratiques de délégués, Vous vous abstiendrez tous au premier et deuxième tours des élections de délégués pour pouvoir présenter au troisième tour des délégués :
Est-ce que pour cela notre niveau de vie sera plus élevé ? Non. Au fur et à mesure que la durée de notre présence à l'usine s'accroît, notre standard de vie baisse. 45 heures, 48 heures... Sans compter que la presque totalité du salaire des "heures supplémentaires" passe dans les caisses de l'Etat (impôt cédulaire), notamment pour les P1, P2 et P3. Ce qui est plus grave, c'est que c'est une atteinte à notre santé, car le séjour prolongé dans l'atmosphère empoisonnée de la régie ne peut que miner un peu plus notre organisme. C'est, de plus, une atteinte à notre droit le plus élémentaire, mais aussi le plus sacré : la liberté de réunion. Il n'est pas facile de nous réunir après 9 et 10 heures de travail abrutissant. Et dans ces conditions, il nous est encore bien plus pénible de réfléchir aux moyens de défendre nos intérêts. Et ne parlons pas des réunions sportives. Car faire une séance de culture physique après 9 heures et demie de travail à la régie devient non plus un moyen d'entretenir notre santé, mais un surmenage de plus pour notre corps. En allongeant notre journée de travail, c'est le souci de nous abrutir, qui guide le patronat, plutôt que celui de la production. Le soir, une équipe de matraqueurs m'attendaient. Mais ils se tinrent tranquilles quand ils virent que j'avais eu la précaution de me faire accompagner par des camarades. Ces "responsables", qui sont les fervents défenseurs de la production, passent beaucoup plus de temps à discuter qu'à leur boulot. Ils diffusent journellement des tracts et des journaux pendant le travail, et ce sont eux qui veulent, par la force, nous empêcher d'émettre nos opinions. Il faut qu'eux-mêmes ne soient pas très convaincus de la justesse de leur position pour user de telles méthodes. Au 49, comme ailleurs, nous saurons imposer la démocratie. Les ouvriers sont assez grands pour juger où sont les diviseurs. Le système de la paye à jours fixes (par exemple tous les deux mardis) était une conquête de 1936. De cette manière, la paye tombait au bout d'un temps toujours le même ; tandis que maintenant, sans compter le jour supplémentaire d'attente, lorsque l'arrêt des comptes tombera sur un dimanche ou un samedi, ce sera autant de jours reportés à la quinzaine suivante. Certaines quinzaines seront de dix jours, d'autres de onze ou douze jours, et le prélèvement des impôts en sera augmenté dans ce dernier cas. Nous ne voulons pas de ces combines. Toutes les payes doivent être les mêmes et avoir lieu à jour fixe. Notre salaire n'est pas tellement grand que nous puissions attendre après. Camarades, si de pareils faits se reproduisent, ne cédez pas à la violence, alertez vos camarades d'atelier, et, surtout, signalez le fait à La Voix. Il faut boycotter de tels votes qui, n'ayant d'autre objet que de faire revenir les ouvriers sur leur décision, visent tout simplement à les démoraliser et à les faire capituler. Nous en savons quelque chose... A l'exemple de notre revendication, les ouvriers de la Polymécanique à Pantin, ont exigé et obtenu le paiement des heures de grève. Alors que la part des salaires dans l'industrie et le commerce a diminué depuis un an de 31 à 28 p.100, la part des capitalistes dans le revenu national a augmenté de 65 p.100. Dur avec les ouvriers, le gouvernement est tendre pour les capitalistes. C'est ainsi, qu'entre autres, l'indemnité allouée aux actionnaires de la Banque de France est portée de 28.000 à 44.500 francs. Cependant de nouvelles hausses de prix se préparent sous prétexte de hausse des salaires. Seul un salaire minimum vital garanti par l'échelle mobile peut défendre la classe ouvrière contre les atteintes continuelles du patronat à notre pouvoir d'achat.
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SOUSCRIPTIONS POUR LA
PARUTION
DE LA VOIX |
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Département 18 |
2.186 fr. |
Département 49 |
295 fr |
Département 6 |
9.800 fr. |
Département 88 |
1.300 fr |
Département A.O.C.(atelier 136) |
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Département A.O.C.(affûtage) |
615 fr. |
14.617 fr.50 |
Il est donc indispensable que nous agrandissions le format de La Voix des Travailleurs. Mais, pour cela, il nous faut de plus grandes ressources pécuniaires. C'est pour nous les procurer que nous demandons à chaque camarade de diffuser La Voix partout autour de lui (en particulier auprès des ouvriers des autres usines), de recueillir des abonnements et des souscriptions, que nous recevrons les mercredi et vendredi à la permanence. Camarades, soutenez La Voix des Travailleurs de chez Renault pour qu'elle puisse devenir le journal DE TOUS LES TRAVAILLEURS ! |
A quand la fin ! Quai Stalingrad, bascule de la Seine.
Les élections approchent, il faut que chacun prenne conscience qu'il ne peut être défendu auprès de la direction et des pouvoirs publics que par des gens qui ne se laissent pas acheter. Ceci posé, comment opérer pour les élections ? Les lois en vigueur empêchent toute candidature (au premier et au deuxième tour) n'émanant pas des syndicats les plus représentatifs, mais au troisième tour, toutes les candidatures peuvent se manifester. Abstenez-vous donc de voter au premier et au deuxième tour, ainsi le quorum ne sera pas atteint et au troisième tour votez tous en masse pour les candidats que vous aurez choisis parmi les meilleurs. Camarades, ouvriers, employés et techniciens de la R.N.U.R., en avant ! pour une section syndicale propre, indépendante et démocratique. SIBIET
(Collège
techniciens).
M. Graterie, délégué du 309, se contente de salir les ouvriers sous le manteau, de bouche à oreille. La tactique consiste à faire croire que la grève a été le fait d'une minorité d'énergumènes. De même que le refus quasi collectif du timbre serait l'oeuvre de quelques-uns qui terrorisent l'ensemble des ouvriers. Par exemple, la seule ouvrière qui travaille au montage des essieux aurait à elle seule terrorisé le reste de l'atelier !... La C.E. du département a envoyé une délégation au chef du département au sujet du nouveau système de paie, le 7 et le 22. Le chef du département s'est étonné de ce mécontentement car, a-t-il dit, au moment où cette décision a été prise, il avait consulté les délégués qui avaient assuré qu'il n'y avait aucune objection de la part des ouvriers. Nous lui avons répondu que le délégué n'avait pas daigné consulter les ouvriers à ce sujet, ce qui est un cas flagrant du sans-gêne de ce dernier. Le chef du département s'est refusé à prendre position, mais étudiera lui-même la question. Nous lui avons répondu : "Du côté ouvrier, la question est tout étudiée. Nous ne voulons pas attendre un jour de plus après la paie. Nous voulons des quinzaines régulières. Les arguments concernant les économies qu'apporterait à la Régie le nouveau système ne nous concernent pas, puisque c'est encore nous qui en faisons les frais." Hier, nous avons demandé aux ouvriers du département de débrayer à l'exemple des 6 et 18 pour protester contre la diminution, pendant deux jours, de notre ration de pain. Certains camarades ont cru que notre grève serait mal interprétée, que nous ferions du tort aux ouvriers boulangers. Mais y avait-il une autre manière de manifester notre solidarité avec eux, de prouver que nous n'étions pas dupes de la manoeuvre ?
En quoi s'est manifesté mon arrivisme ? J'ai appartenu aux Jeunesses communistes à partir de 1934. En 1935-36, j'ai été secrétaire des J.C. de Vanves. Mobilisé en 1937, j'ai été prisonnier en mai 1940 et me suis évadé en août 40. J'ai milité clandestinement à l'usine, chez Renault, dans les rangs du P.C.F., à partir de 1941. A la libération je fus désigné par la C.E. du syndicat au Comité de Libération, où j'assumai la tâche de secrétaire-adjoint et je fus mandaté pour assumer la tâche de responsable des M.P. dans l'usine. J'ai
abandonné
le
parti parce que j'étais en désaccord sur la question de
rendre
les armes que les "M.P." avaient eu tant de mal à
conquérir et pour ne pas faire un travail de mouchardage
imposé par le parti. Est-ce là une carrière
d'arriviste, quand on sait par quels bons postes sont
récompensés ceux qui restent fidèles à "la
ligne" ? Que le courageux anonyme qui a écrit cet article se
fasse connaître. Sinon est la boîte aux lettres des
calomniateurs
anonymes.
Fiquet
(Bas-Meudon)
A la suite de cet incident, la camarade a dû quitter l'usine pour éviter des complications dans le ménage de cet ouvrier. Voilà avec quelle bassesse agissent ceux pour qui tous les moyens sont bons lorsqu'il s'agit de discréditer une ouvrière.
Si ces "camarades" sont avec nous, ils pourront aussi bien se faire élire au troisième tour.
L'assemblée
générale C.G.T. des départements 6 et 18 a eu lieu
la semaine dernière : sur 1.100 à 1.200 ouvriers (1.600
à 1.800 avec les collaborateurs), il y avait 19 présents.
A Collas, de nombreux ouvriers vinrent, dès le matin, trouver les camarades qui avaient dirigé la grève et leur demandèrent : Que fait-on ? Une délégation du Comité d'action provisoire se rendit immédiatement auprès de la section syndicale pour lui demander ce qu'elle pensait faire. Une fois de plus nos camarades montraient leur volonté d'agir avec l'ensemble des ouvriers. La réponse de Delame, secrétaire syndical, fut très vague : "Pour l'instant il n'y a rien de prévu. On ne peut rien prévoir à l'avance, car les événements se déroulent à une vitesse vertigineuse (?)". Et il concluait en nous invitant à assister à la délégation qui se rendait à l'Hôtel Matignon. Toutefois, il nous faisait savoir que le car était plein et qu'il nous faudrait nous y rendre en métro (ce qui ne nous gêne nullement, mais montre que ces gens ne veulent pas se mélanger avec des énervés). A L'Hôtel Matignon, on ne voulut pas recevoir la délégation entière qui comprenait une cinquantaine de délégués, mais seulement une demi-douzaine de cégétistes. Quand ils ressortirent un ordre laconique fut donné : "Tous dans les cars" sans rien dire où l'on allait. Les camarades de Collas ne furent pas admis à cette "promenade". C'est alors qu'ils revinrent rendre compte de leur démarche aux ouvriers à midi et demi et que la grève fut votée de 1 h. à 6 h. 30 en signe de protestation. Résoudre le problème du pain, les ouvriers de Collas sont très conscients que ce n'est pas une grève de 5 h. par 1.500 ouvriers qui peut le faire. Ils savent que seule une action de grande envergure peut leur donner satisfaction. La grève de lundi n'avait qu'un caractère de protestation. Les ouvriers de Collas ont protesté non pas d'une manière platonique par un défilé après le travail, mais sur le lieu du travail auprès des machines arrêtées. Il faut que le patronat et le gouvernement sachent qu'aussitôt qu'ils emploieront une brimade contre les ouvriers, ils auront la réplique immédiate. A chacun de leur
coup
de
trique, ils répondront par un coup de trique.
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